EXOTIQUE, ALLEMAND, HERZOG. FANTASTIQUE.
Le film impressionne par la beauté grandiose des images et par la tension qui se dégage de l'"enfer" vert.
Dans les entrailles de la forêt amazonienne au Pérou, Klaus Kinski interprète un allemand fortuné et fou de Caruso - Fitzcarraldo. Celui-ci essaie avec sa femme de réaliser le rêve de sa vie, celui de monter un opéra en pleine jungle pour les enfants riverains . L'entreprise se révèlera d'une ampleur homérique.
Une ambigüité d'interprétation s'exprime à chaque moment du film, et on a peur que ça tourne à la tragédie en écoutant les bruits sourds des épaves du paquebot, ou en voyant le regard un peu "psychokiller" de Fitzcarraldo .
Le rapport un peu rude, presque brutal, que le protagoniste entretien avec la tribulation de son paquebot, crée cette tension entre la réalisation de son projet d'opéra dans la jungle et la perturbation de la vie dans la communauté indienne locale.
La vraisemblance est saisissante, certaines scènes sont d'une expression troublante, où l'on ne sait plus si les acteurs jouent la représentation ou s'ils jouent la réalité, on se croirait dans un documentaire, et on est embarrassé par la complexité croissante d'une entreprise qui risque à chaque moment d'échouer.
Le rapport entre les indiens et le protagoniste dans le film est à souligner. Il nous renvoie au rapport entre les blancs, envahisseurs et colonisateurs du continent américain, et les indiens, natifs de la forêt. Il s'agit d'un combat, pas tout à fait déclaré, pas tout à fait négligé, entre deux modes d'existence humaine collective, la vie des indiens, intégrés à leur habitat sauvage, vivant en petite communauté et fidèles à leurs identités, contre les européens colonisateurs et leurs désirs de conquête et de gloire.
Au-delà de cette question ethnohistorique, c'est aussi un combat entre deux forces : celle de l'homme (en tant qu'espèce animale) et celle la nature sauvage, entre la force brute de celle-ci contre la force et l'ingéniosité de l'esprit collectif des hommes de l'autre.