Duel d'acteurs et poudre aux yeux

Très vite, on ne voit quasiment plus que ce duel : Vincent Cassel versus Romain Duris. Et on se demande qui va l'emporter : le commandant de police (puisqu'on ne dit plus inspecteur) ou le professeur de français ?
Un ado, Dany Arnault, a disparu. La mère (Sandrine Kiberlain) éplorée signale sa disparition à la police, alors que le père, officier de marine, est en mission à des centaines de kilomètres de là. François Visconti (Cassel), un policier alcoolique depuis le décès (ou le départ ?) de sa femme, se charge de l'enquête et, très vite, trouve suspect le comportement de Yann Bellaile (Duris), prof de français au lycée que fréquentait l'ado disparu et qui lui avait, un temps, donné des cours de rattrapage privés.
On assiste, pendant les deux tiers du film, à une espèce de duel mano a mano entre le policier alcoolo et le prof qui habite le même immeuble que la famille du disparu (à l'étage juste au dessus), le premier soupçonnant le second (qui s'intéresse un peu trop à l'enquête) de ne pas lui dire tout ce qu'il sait.

J'ai toujours trouvé que Vincent Cassel avait tendance à surjouer, mais je dois dire que dans Fleuve noir, sa composition est impressionnante. Et Romain Duris que, d'ordinaire, je n'aime pas plus que Cassel, est aussi très bon dans son rôle de pisse-froid barbu, lettré et sûr de lui. Donnent-ils l'un et l'autre dans le too much ? À vous d'en juger.
Il y a aussi Marie, l'autre enfant du couple Arnault, une demeurée d'une douzaine (?) d'années à qui il est quasi impossible de tirer trois mots cohérents de suite (même en présence de sa mère, pourtant d'une patience d'ange à son égard), mais qui sait peut-être des choses sur la disparition de son frère (fugue ? enlèvement ? meurtre ?).
Pour compliquer les choses qui le sont déjà passablement, Visconti / Cassel tombe plus ou moins amoureux de la mère minée par l'inquiétude et, abusant de sa faiblesse, la saute incroyablement (impardonnablement ?), alors qu'il vient enquêter chez elle et que Marie-la-demeurée est dans la chambre juste à côté et peut débouler dans le living à tout moment.
Tombant de charybde en scylla, le spectateur assiste un peu après, dans le bois proche de l'immeuble des Arnault, à une scène à coloration homophobe, dure à avaler.
Bref, tout le long de ce Fleuve noir, Zonca et son équipe nous mènent habilement en bateau. Si bien qu'à l'heure du dénouement (à double détente et un peu tiré par les cheveux), on est bien forcé de reconnaître qu'on ne l'avait pas vraiment vu venir.

Conclusion : un polar assez glauque, qui nous balade pendant près de deux heures et dont la résolution nous laisse comme deux ronds de flan.