Blablacar
Déjà, les espagnols ont manqué de clarté sur le choix du nom du film. Initialement intitulé El Cuarto Pasajero, Alex de la Iglesia l'avait finalement appelé BlaBlaCar...sauf qu'au ciné, tu cherchees...
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le 22 nov. 2022
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J’aurais pu être refroidi par la grosse déception qu’a été l’an dernier Veneciafrenia, tentative ratée de slasher à Venise d’Alex de la Iglesia. Mais non, je n’y peux rien, c’est plus fort que moi, il faut à chaque fois que je vois le nouveau film du réalisateur ibérique et ce depuis son premier long métrage Accion Mutante (1993). Il fait partie de ces metteurs en scène dont le cinéma me correspond parfaitement et, bien qu’il y ait eu des faux pas tels que Veneciafrenia donc ou Messi (parce que je me fiche éperdument du foot), je suis attentivement ce qu’il fait. Alors forcément, je me suis jeté sur El Cuarto Pasajero, qu’on aurait pu traduire chez nous par Le Quatrième Passager (alors qu’il écopera du titre Blabla Car…). Est-ce là une référence à Alien, sous-titré Le 8ème Passager ? Avec un de ses personnages qui va être un vrai parasite dans un huis clos (ici une voiture) ? Peut-être. Ce qui est sûr, c’est que nous sommes ici dans une « comédie routière » qui va profiter de son petit budget pour mettre en valeur ses acteurs/personnages et les amener dans une série d’évènements loufoques.
La comédie semble être un genre qui correspond très bien à Alex de la Iglesia et, tout au long de sa carrière, il n’aura de cesse de l’associer à d’autres genres ou styles narratifs. Dans Accion Mutante, il mélange son humour acide à de la science-fiction ; dans Le Jour de la Bête et Les Sorcières de Zugarramurdi, avec de l’horreur / fantastique ; dans Mes Chers Voisins et Le Crime Farpait, la comédie noire est mélangée au thriller ; ou encore dans 800 Balles, il joue avec les codes du film de western et du film d’action. Avec El Cuarto Pasajero, c’est encore le cas et la comédie tantôt noire tantôt loufoque vient prendre des allures de road movie sous forme de huis clos. Le film nous présente Julian, un quinqua divorcé en proie à des problèmes financiers et qui décide d’utiliser une application de covoiturage pour essayer de renflouer un peu les caisses. Il va tomber amoureux de Lorena, une jeune passagère qui se rend souvent à Madrid, comme lui, et va s’arranger à chaque fois pour que ses autres passagers ne viennent pas perturber cette petite relation, pour l’instant platonique qui se met en place. Mais lors d’un trajet, alors qu’il compte bien déclarer sa flamme à la demoiselle, une erreur dans le choix du reste des passagers va provoquer un changement radical dans le court des évènements. Une majeure partie du film se déroulant dans l’habitacle étroit de la voiture de Julian, El Cuarto Pasajero va donc se concentrer essentiellement sur les personnages et les échanges verbaux qu’ils vont avoir entre eux. C’est là que tout le talent des acteurs va rentrer en compte et le résultat va être des plus délicieux.
Outre les dialogues très bien écrits et souvent hilarants, comme d’habitude avec Alex de la Iglesia, le jeu des acteurs va être une des grandes réussites du film. Alberto San Juan (Malveillance, De L’autre Côté du Lit) et Ernesto Alterio (Perfectos Desconocidos, Origines Secrètes) sont tout bonnement géniaux, le premier en amoureux pathétique, un peu perdu, qui ne sait pas comment s’y prendre pour déclarer sa flamme, le deuxième en parasite irritant et complètement hurluberlu, véritable caméléon se sortant de toutes les situations. Chacune de leurs interactions tire le film vers le haut et leur alchimie est palpable. La Jolie Blanca Suarez (El Bar, La Piel Que Habito) s’en sort également bien malgré un changement de comportement un peu brutal de son personnage. Seul Ruben Cortada, dans le rôle du beau gosse qui drague rien qu’avec son regard, est un peu décevant car son personnage s’essouffle rapidement et va perdre du poids par rapport aux autres. Ce quatuor est l’essence même du film, celui par lequel passe tout l’humour du film. Bien entendu, il y a les seconds rôles très funs, comme souvent chez le réalisateur, interprétés par des acteurs fétiches de De La Iglesia. On citera par exemple l’excellent Carlos Areces qu’on a pu voir dans Balada Triste, Les Sorcières de Zugarramurdi ou dans Mi Gran Noche ; ou encore l’inimitable Enrique Villen et son regard improbable qu’on retrouve régulièrement dans la filmo de De La Iglesia et ce depuis Le Jour de la Bête en 1995.
El Cuarto Pasajero est parfaitement réalisé. Chaque gag, chaque ligne de dialogue et chaque situation est à sa place. Certes, on est ici dans quelque chose bien moins critique que les autres satires du réalisateur, mais on a juste l’impression que De La Iglesia avait envie de faire quelque chose de plus absurde, de plus fun, juste pour amuser le public. C’est souvent irrésistible, à la limite du slapstick, avec un rythme parfois proche d’un cartoon du genre Bip Bip et le Coyote, avec bien entendu des pétages de câbles comme aime les faire Alex comme la scène de la station-service ou, bien entendu, ce final qui vire presque au n’importe quoi, un gros pétage de plomb qui dénote un peu avec le reste du film, absurde mais réaliste, en virant dans le loufoque et le rocambolesque le plus total. Ce troisième acte pourra déstabiliser les néophytes du cinéma du réalisateur, mais il est pourtant le point d’orgue d’un film qui, à force de se serrer dans un habitacle de voiture et d’y faire monter la pression, avec besoin d’exploser et de finir de façon impertinente comme pour balancer un gros fuck à la bien-pensance (d’où le doigt d’honneur par la fenêtre sur l’affiche originale ?). Certains considèrent déjà le film comme un Alex de la Iglesia mineur. Pourtant, avec la variété des plans dans un si petite espace clos, la façon dont il évite tous les pièges du huis clos, le montage fluide et les personnages bien plus travaillés qu’il n’y parait, cet El Cuarto Pasajero n’a rien d’un film mineur. Ce n’est peut-être pas sa plus grande réussite, mais il reste une excellente comédie qui file à toute vitesse qu’on regarde avec un grand sourire aux lèvres. Et puis les pétages de plomb en espagnol, c’est tout simplement jouissif.
Après un Veneciafrenia raté, Alex de la Iglesia signe avec El Cuarto Pasajero une comédie sous forme de huis clos dans une voiture des plus réussies, grâce à d’excellents personnages, une très bonne mise en scène et un grand sens de l’humour.
Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-el-cuarto-pasajero-de-alex-de-la-iglesia-2022/
Créée
le 24 avr. 2023
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