---Bonjour voyageur égaré. Cette critique fait partie d'une série. Tu es ici au sixième chapitre. Je tiens à jour l'ordre et l'avancée de cette étrange saga ici :
https://www.senscritique.com/liste/Franky_goes_to_Hollywood/2022160
Si tu n'en a rien a faire et que tu veux juste la critique, tu peux lire, mais certains passages te sembleront obscurs. Je m'en excuse d'avance. Bonne soirée. --


Mon trésor,


Comme tu as pu le constater dans mes précédentes lettres, j’attendais beaucoup le film de ce soir, et pour cause. Je suis certaine que toi aussi tu attends cette lettre avec plus d’impatience que les autres, comme une réminiscence de novembre dernier, et de tout le bonheur qu’il nous a apporté, à tous les deux. Ne t’inquiète de rien mon amour, le film que j’ai vu ce soir est parfaitement à la hauteur de ce que son titre nous laisse espérer : *Frankenstein rencontre le loup-garou* est un navet, mais du genre délicieux dont on reprendrait bien une part après avoir fini son assiette.  
Bon, parce que c’est pas rien quand même, je m’arrête sur le titre, première parjure plus amusante que consternante à nos deux légendes : Ça y est, Universal a arrêté de se soucier du fait que Frankenstein soit le nom du docteur, et non celui de la créature. Car aucun des docteurs Frankenstein que nous ont présentés les films précédents n’était à l’affiche du film de ce soir, ni aucun descendant potentiel (si, il y a bien la fille du dernier, mais tu comprends, c’est une fille, elle ne peut pas être docteur…). Bref, le Frankenstein que nous vend le titre désigne bien la créature. Voilà. Autre aberration du titre, plus flagrante, pour une fois, dans sa version originale que dans sa version traduite, est la notion de rencontre entre les deux monstres et même carrément de versus à en croire le titre anglais. Notion bien prétentieuse en regard du film proposé, puisque de rencontre nous n’en avons qu’en deuxième moitié de métrage, et encore très succincte, réduisant les dialogues à trois phrases, les interactions à… néant. Quant au combat que nous suggère le titre original, on l’attend bien longtemps pour bien peu de choses. Car si combat il y a bien, ce n’est que dans les dix dernières minutes, sans trop de raison ni d’effets, puisque de toute façon tout le monde finit prétendument noyé avant l’issue de la rencontre. Nous n’aurons donc pas ce soir la réponse à la question que tout le monde s’est déjà posé une fois au moins dans sa vie : qui de la créature de Frankenstein ou du loup-garou est le plus fort ? Question à laquelle toi comme moi connaissons la réponse, bien entendu. Comment cette poupée de chiffon rouillée pourrait ne serait-ce que menacer même le plus raté des représentant de notre race ?
Car raté il l’est bien ! Lon Chaney -pour lequel tu connais pourtant tout mon affection- interprète notre représentant au plus bas de sa forme. Ressuscité mystérieusement (il me semble pourtant que le film précédent s’était donné la peine de le tuer à l’argent), le loup-garou prend alors conscience qu’il est immortel (il aura quand même au préalable pioncé dans un cercueil pendant quatre ans sans s’apercevoir de rien. Un vrai vampire !). Dépité, il cherche partout le remède à cette étrange maladie qu'est l'immortalité. Et j’ai eu beau scander à tous les personnages qui traversaient l’écran de lui couper la tête et de la jeter dans une rivière, personne ne m’a écouté, et le pauvre bougre s’est retrouvé jusqu’au village du dernier décès de la créature de Frankenstein, en apprenti scientifique, à essayer de démêler une curieuse théorie d’inversion des pôles magnétiques de la vie, ou je ne sais quoi. Ajoute à ça des transformations en ours en peluche à base de fondu enchaîné assez malheureux et pourtant montrés en gros plan, et tu auras une idée du sort qu’est encore réservé à la lycanthropie.
Ma star du mois n’est pas beaucoup plus gâtée. N’arrivant que très tardivement dans le film, elle régresse plus bas qu’Universal ne l’a jamais porté : nous voila de retour en 1910, où la créature de Frankenstein n’était qu’un monstre unilatéral, mauvais de bout en bout, incapable de penser ou de ressentir. Il perd d’ailleurs sans explications aucune le don de parole qu’il avait acquit dans le dernier film. Bela Lugosi, pour lequel tu connais également tout mon amour, incarne comme à son habitude son personnage dans la démesure. Les bras en avant, les jambes raides, il caricature comme il sait le faire le rôle habituellement endossé par Boris Karloff.
Arrivé à ce stade je ne vais plus beaucoup m’attarder sur cette critique. Tu auras compris que ce n’est pas ce film qui va beaucoup faire avancer ma recherche. Laisse moi tout de même te raconter la fin : après nous avoir bien bassiné pendant une heure sur l’incapacité à mourir du loup-garou ; après quatre films à nous ressusciter à tout bout de champs la créature de Frankenstein, on abouti donc à ce combat, dans ce contexte insolvable, entre deux immortels inconditionnels. Là dessus un humain ayant ouvertement annoncé devant la police son intention criminelle la réalise pourtant bel et bien le lendemain sans aucun soupçon des forces de l’ordre et inonde le lieu du combat. Je te le donne en mille : cette ridicule arrivée d’eau a raison de la créature et du loup-garou. Fin, ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants…
Ce film m’aura tout de même diverti, et je n’étais pas optimiste au point d’en attendre plus. Au fil des ans, le plaisir de retrouver mes créatures des éditions précédentes grandit, et tu imagine bien que le lycanthrope, par un narcissisme évident, est mon favori. Mais je mentais tout à l’heure en écrivant que le film de ce soir ne fait pas avancer mon enquête : il met en relief un fait évidemment mais que je n’avais pas particulièrement énoncé : celui que je recherche est du genre statique, c’est à moi, le loup-garou, de traverser la moitié du monde s’il le faut pour aller à sa rencontre. Reste à savoir pour quelle destination je dois prendre mon premier billet d’avion…
Réponds-moi vite,
H.
Zalya
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le 8 nov. 2018

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Zalya

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