Travaillant pour les studios Disney, Tim Burton, âgé de 24 ans, réalisa un court métrage live, hommage aux films d'horreur des années 30: Frankenweenie. Vingt ans plus tard, le réalisateur, dorénavant célèbre, fait revenir d’entre les morts le chien Sparky et son maitre Victor Frankenstein, pour un long métrage, celui qu’il voulait faire au départ. Le projet enfin concrétisé, créé cette fois en stop motion, cette version canine de Frankenstein vaut-elle le coup d’œil ?
Quand Mr Moustache rêve de toi, ca veut dire qu’il va t’arriver quelque chose d’important
Voila le genre de film qui parlera à celles et ceux qui ont eu, ou ont du mal à faire le deuil de leur animal de compagnie. Qu'aurions-nous fait à la place de Victor si nous avions ses compétences? Enfants, il y a deux catégories : les introvertis, et les extravertis. Alors que la deuxième catégorie n’aura pas beaucoup d’efforts à fournir en tentant de se faire de nouvelles connaissances et amis, il n’en sera pas de même pour les introvertis. Trois choix s’offriront à cette première catégorie : prendre son courage à deux mains pour aller vers les autres ou avoir la chance de rencontrer quelqu’un avec qui une amitié naitra, soit, s’inventer un ami imaginaire ou se lier d’amitié avec son animal de compagnie, offert gracieusement par des parents compatissants. La différence entre un humain et un animal, l’animal ne vous jugera jamais, ne vous laissera jamais tomber. Parce que oui, quoique beaucoup de personnes disent, les animaux, en particulier les chiens, sont les seuls êtres qui vous aime plus qu’ils ne s’aiment eux-mêmes.
Victor, le petit garçon que nous suivrons dans le film Frankenweenie, fait partit de la première catégorie et a opté pour le troisième choix. Son meilleur ami, il l’a choisit : ca sera Sparky, son petit bull-terrier dévoué à son jeune maitre. Sparky pourrait mourir pour protéger Victor. Alors, quand un accident cruel voit Victor perdre son meilleur ami, c’est tout son monde qui s’écroule. Perdre son animal c’est perdre une partie de soi comme si on perdait un membre de sa famille. Comment parvenir à aller de l’avant ? Comment surmonter un tel deuil ? En perte totale de repère, le jeune garçon va s’en remettre à la science en apprenant à l’école que l’électricité peut faire réagir n’importe quel corps mort.
Tel le véritable Docteur Frankenstein (et hommage assumé de tout l’univers du personnage), le petit Victor, enfilant sa tenue de savant fou, s’installant un véritable laboratoire dans son grenier et réunissant tout son matériel, parvient à ressusciter son chien. Ramener à la vie n’importe quel être a de lourdes conséquences, en particulier pour le défunt. Pourtant, aux premiers abords, hormis quelques légères modifications physiques apportées, Sparky semble être égal à lui-même.
Le problème, c’est qu’il a certains morceaux de son corps telles ses oreilles qui se font la malle (il doit sans cesse être recousu), et il fonctionne maintenant comme une batterie devant s’en cesse être rechargée. Autre soucis, comment réussir à cacher la bête sans que qui que ce soit ne le voit ? Par un malheureux hasard, Edgar, portrait craché d’Igor, l’assistant bossu de Victor Frankenstein, a découvert que le chien de Victor avait été ressuscité. Ca tombe bien mal, la classe de Victor prépare un concours de science avec une récompense pour les deux futurs gagnants. Opportuniste, Edgar va faire chanter Victor et percer son secret afin de pouvoir lui aussi ressusciter un animal. C’est là que les ennuis s’amplifient et qu’une panique générale est sur le point d’éclater dans tout New Holland…
Quand on se livre à expérience, tout ce qui compte c’est essayer. Peut
importe d’échouer du moment qu’on a au moins essayé.
Il voulait seulement que son chien revienne
Il n’y a que Tim Burton pour véhiculer autant d’émotion à travers un style gothique très sombre. Avec son film, attendez-vous à pleurer de tristesse et de joie. Si vous êtes fan des vieux films d’horreur des années 30, Frankenweenie est à ne pas manquer. Si vous êtes fan des animaux, de stop motion, ce film est à ne pas manque non plus. Tim Burton n’a jamais caché son affection pour les Dracula, Frankenstein, La momie et autres monstres célèbres des studios Universal.
A chaque sortie de film, on peut être sûr qu’une référence sera cachée par ci-par là. Pour Frankenweenie, c’est la fête. Entre les noms des protagonistes comme Victor Frankenstein, Elsa Van Helsing ou Edgar E Gore (pour Edgar Allan Poe), l’emploi du noir et blanc faisant rapidement écho au court métrage Frankenweenie et Frankenstein, l’apparition clin d’œil de Christopher Lee, la chienne d’Elsa Van Helsing et ses grosses mèches blanches apparaissant sur sa tête (La fiancée de Frankenstein), un cimetière surplombant la ville (ici, il s'agit d'un cimetière d'animaux), et beaucoup d’autres références visuelles ou auditives aux films du genre, vous aurez de quoi faire.
Lors des 45 premières minutes, Frankenweenie a tout du film d’animation dramatique pour enfants. Mais, passé ce délai, gros tournant, notre œuvre se transforme en film d’horreur pouvant impressionner les plus petits. D’où sa recommandation à partir de 10 ans. Si vous chers bambins n’ont pas hurlé de terreur en regardant un certain Gremlins, Frankenweenie passera comme une lettre à la poste.
Vous ne comprenez rien à la science alors vous en avez peur comme un
chien a peur du tonnerre ou des ballons. Pour vous science est magie
et sorcellerie parce que vous êtes tous têtes d’épingles.
Nouvelle prouesse technique en matière de stop motion
Plus de 200 marionnettes (comportant plus de 300 articulations), dont 18 du héros Victor et 15 de son chien Sparky, une majeur partie de l'équipe qui avait participée à l'élaboration des Noces Funèbres en 2004 fait son retour pour Frankenweenie. Par ailleurs, Rick Heinrichs, le décorateur ayant créé les décors du court métrage d'origine Frankenweenie, est revenu pour l'occasion. Résultat, des tonnes et des tonnes de détails en matière d'objets, architecture, véhicules et personnages portant de véritables vêtements tricotés à la main. Frankenweenie, en matière d'esthétisme, rivalise sans problème avec L’étrange Noel de Mr Jack et Les Noces funèbres. Les années étant passées, la technologie continue d'évoluer, donnant de nouvelles possibilités. Quand on voit le travail sur la gestuelle des personnages de notre film, ainsi que les animations se passant tout autour d'eux, on ne peut qu'applaudir.
L’univers de Tim Burton n’a plus de secrets pour vous ? Vous naviguerez en terrain connu puisque dans Frankenweenie, nos personnages aux gros yeux sur le point d’imploser, aux jambes longues et maigrichonnes, ont des visages ressemblant aux héros d’œuvres connues de notre maitre du fantastique. Elsa Van Helsing ressemble à s’y méprendre à Lydia de Beetlejuice, Victor à Edward aux mains d’argent (bien que cette fois Johnny Depp n’ait pas crédité dans le film). Quand au quartier dans lequel vit Victor, on ne peut s’empêcher de voir que la disposition des maisons ressemble au quartier où vit Peg et sa famille dans Edward aux mains d’argent.
Frankenweenie, c’est un fait, il est tragique. Résultat, l**es plus sensibles risquent de ne pas toujours supporter certaines images bien que tout soit suggéré** (la mort de Sparky, Victor déterrant son corps). On nous montre clairement ce que veut dire la disparition, le deuil. Soyez rassuré, Frankenweenie c'est aussi des thématiques, messages et réflexions maitrisées: Critique de l'adulte utilisant son enfant à ses propres fins, l'esprit de compétition, l'égoïsme, l'important de tenir sa promesse, ne pas lâcher son don, la difficulté de perdre son animal de compagnie, accepter l'autre (critique de l'ignorance, de l'étroitesse d'esprit de certaines personnes), les expériences scientifique et ses véritables motivations , se poser des questions, prendre en compte son implication émotionnelle lors d'une expérience, la science vient du cœur, la religion et la science sont similaire et demandent d’avoir l’esprit ouvert, l'importance d'oser et de recommencer s'il y a échec.
Je ne veux plus jamais te perdre.
Au final, Frankenweenie, merveilleux petit film en stop motion pour les amoureux des animaux et fans des vieux films d’horreur. Si en plus de ça vous êtes fan du travail de Tim Burton, vous serez aux anges. Humour noir, tragédie, joie, terreur, passion, thématique sur la résurrection et ses conséquences maitrisée, un magnifique film aussi riche visuellement que narrativement, le tout accompagné d’une musique d’un très bon cru mixant frayeur, dramaturgie et bonheur, signée Danny Elfman.