Plus qu'humains
Déboulant d'on ne sait où, à une époque où l'on ne jure plus au cinéma que par les jedis post-pubertaires, les justiciers en collants et les débilités fastandfuriesques, Freaks est une péloche...
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le 21 janv. 2020
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Déboulant d'on ne sait où, à une époque où l'on ne jure plus au cinéma que par les jedis post-pubertaires, les justiciers en collants et les débilités fastandfuriesques, Freaks est une péloche étonnante à plus d'un titre. Une agréable surprise dont on ne peut que vanter les mérites et qui semble d'ores-et-déjà promis à devenir un futur classique du genre. Emballé par le duo de nouveaux venus Zach Lipovsky et Adam B. Stein qui en signent aussi le très ingénieux scénario, cette petite série B surprenante se repose avant tout sur un pitch intrigant, même si son histoire reste au fond assez classique.
Chloé est une petite fille de sept ans qui vit seule avec son père. Protecteur et paranoïaque, celui-ci lui défend de sortir de leur maison, arguant que le monde extérieur est trop dangereux pour eux. Attirée par la musique d'un marchand de glaces ambulant qui passe chaque jour à proximité de leur domicile, et avec lequel elle semble entretenir un étrange lien télépathique, Chloé finit par sortir à l'insu de son père et découvre alors un monde nouveau et mystérieux aux côtés du vieux monsieur Snowcone. Celui-ci décèle en elle un inquiétant pouvoir et lui explique que les personnes comme elle et lui sont traquées sans relâche par une branche militaire du gouvernement, à la suite d'un attentat qui a eu lieu quelques années plus tôt.
Difficile de ne pas éventer le reste de l'intrigue dans ce qui suit. Le sujet au centre de Freaks n'a bien évidemment rien d'original, ne serait-ce que pour avoir déjà été exploré au cinéma dans la saga X-Men ou en littérature avec Charlie de Stephen King et L'homme doré de Philip K.Dick. L'originalité de l'intrigue ne se trouve donc pas dans son postulat mais bien dans sa façon d'être racontée. Malins, les réalisateurs filment une bonne partie de l'histoire à hauteur de leur jeune héroïne, cantonnant le point de vue du spectateur à celui d'une enfant. Ils entretiennent ainsi dès les premières minutes une ambiance terriblement oppressive, tout en révélant au compte-gouttes les éléments susceptibles de répondre aux questions que se posent le spectateur. Une aura de mystère entoure ainsi Chloé et son père pendant toute la première moitié du métrage, d'autant plus que des apparitions terrifiantes se manifestent (la jeune femme hurlant dans le grenier) et que la fillette révèle progressivement d'étranges pouvoirs, aptes à menacer son paternel.
C'est cette manière de poser doucement le contexte de leur histoire qui participe à faire de Freaks une très bonne surprise, les scénaristes prenant à rebours les codes narratifs d'un genre ultra-balisé et jouant habilement des flash-infos télé, des mises en garde du père (campé par Emile Hirsch) à sa fille et des quelques apparitions de cet inquiétant marchand de glaces (génial Bruce Dern) pour entretenir habilement le suspense. Les éléments du puzzle se recouperont ensuite plus facilement à mesure que Chloé découvrira le monde aux côtés de monsieur Snowcone, révélant ainsi un état policier paranoïaque et sécuritaire dont la politique militaire et l'attitude collaborationniste des citoyens ne peuvent que renvoyer à la triste histoire de la France occupée. Sujet maintes fois exploité dans le genre, la peur de la différence se trouve ici au centre du film mais révèle une approche plus cruelle et vengeresse, jouant sur l'ambiguïté morale de chacun de ses protagonistes, y compris de la petite Chloé. La jeune héroïne révèle ainsi progressivement une certaine dangerosité, conditionnée par la surprotection étouffante de son père, le caractère vindicatif d'un vieux mentor cherchant à l'instrumentaliser et l'absence de sa mère.
L'intelligence du script permet aussi aux réalisateurs de composer avec un budget que l'on devine assez restreint. Cantonné à quelques séquences d'intérieurs et ne révélant jamais vraiment l'ampleur de son contexte, le scénario de Freaks se sert habilement du prétexte des pouvoirs de ses protagonistes pour resserrer son intrigue sur une ambiance en huis-clos, jouant sur une unité de lieu et de temps biaisée et de l'utilisation régulière de hors-champs pour crédibiliser ses éléments fantastiques. Ce procédé de pure série B reste suffisamment bien géré pour ne jamais desservir les enjeux immenses d'un récit filmé pourtant en vase clos. Le coup de génie de Freaks c'est bien ça, revenir à l'essentiel d'un cinéma fantastique qui n'a pas besoin d'être spectaculaire et bourré de thunes pour se révéler diablement divertissant.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes La SF à l'écran, Douce est la vengeance de celui qui a reçu l'injure, Angoisses en huis-clos, Fou ? et Ces films dont je n'attendais rien et qui pourtant...
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le 21 janv. 2020
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