Terrifiant récit d’humiliation et de vengeance que propose Freaks où l’horreur se pose avant tout à échelle d’homme. Contrairement à ce qu’il peut laisser penser, le film ne se livre pas tant à l’apologie de la différence qu’à une peinture acerbe des motivations humaines et de la corruption générale qu’elles engendrent. Le cynisme de la normalité contre la brutalité de la marge. Ou comment la violence diffère selon le milieu et le mode opératoire adopté : à petit feu pour le verbal qui est quotidiennement entretenu par la moquerie et l’insulte ; de manière soudaine et révolutionnaire pour le frontal qui, seul, peut rétablir un semblant d’équilibre. On pourra reprocher au métrage une tendance à la complaisance, cristallisant ses personnages marginaux dans une curiosité parfois malsaine voire carrément grossière dans le but de les élever au rang de monstres hollywoodiens – à l’instar de Frankenstein ou Dracula, alors en vogue. Il n’empêche que Freaks ne tombe jamais dans la fausse compassion, ne tient pas de discours moralisateur prônant la tolérance ; il préfère rétablir l’humanité trop souvent déniée de ces personnes sous le commun recours à la vengeance et à la dignité que cette dernière permet de laver. A l’image de ce couple marginal référentiel qui encadre l’histoire, ayant entre-temps subi la tentation de l’apparente normalité qu’il aura fallu combattre. C’est moralement contestable, certes, mais audacieux et terriblement sombre.