Après avoir réalisé deux longs métrages dans l'indifférence, Kwak Kyung Taek, bénéficiant de l'effet Shiri, écrit un script inspiré directement de sa propre vie. « Friend » est donc l'histoire de son auteur : celle de quatre amis, qui passé l'adolescence, vont prendre des directions différentes. Deux d'entre eux vont intégrer la pègre et grimper les échelons dans deux gangs coréens rivaux.
Réalisé avec soins, démontrant déjà un certain talent pour la réalisation, « Friend » est à Kwak Kyung Taek ce que « Une Balle dans la tête » est à John Woo, à la différence que le film de Woo connut un échec fulgurant au box office à contrario de « Friend » qui explosa tous les records précédemment établis, que ce soit en nombre d'entrées ou en recette.
Construit à la manière d'un « Once Upon a time in America » (référence flatteuse mais bien entendu toutes proportions gardées), « Friend » prend le parti pris de faire évoluer le film en même temps que ses personnages, représentés à différents âges clés de leur vie (enfance, adolescence, adulte). Il réutilisera d'ailleurs ce procédé dans ses deux films suivants : Champion et Mutt Boy. Cela permet de s'attacher, au fil du film, aux personnages et ainsi éprouver l'émotion recherchée par le réalisateur. A ce titre, la scène sous la pluie avec la cigarette qui tombe dans le caniveau sur la musique de Luc Baiwir et Robert Palmer est d'une beauté et d'une maîtrise immense.
Le réalisateur ne néglige aucun détail : la bande son sublime, mélange de vieux titres (Call Me, My Way, Bad Case of Loving You) et de musique classique associée à des chœurs envoûtants, une photographie à tomber par terre et une réalisation réglée au millimètre où chaque cadre ne doit rien au hasard. Sans oublier un casting imposant de charisme et de talent (Yoo Oh-sung et Jang Dong-Kun en tête), tout cela a fait de « Friend » une réussite à la fois critique et commerciale méritée.