Wow, ce film fait partie de ceux qui laissent une empreinte vivace dans notre esprit. Ce qui fait sa force, c’est la « simplicité » du concept, mais comment Haneke réussit à pousser ce concept jusqu’à son paroxysme. Cela se ressent notamment sur l’évolution même du film, comment on débute dans une atmosphère apaisée mais presque déconnectée de la réalité ; et comment peu à peu on sombre dans une violence psychologique presque insoutenable et en même temps, comment on prend racine dans la réalité du film, qui devient la nôtre. Ce processus fait qu’on en sort pour le moins mal à l’aise, déstabilisé.
La violence y joue un rôle prépondérant. Si celle physique est bien présente mais presque hors-champs, c’est bien l’aspect psychologique qui nous enlacent et nous gravent ces scènes dans la rétine. Cela est parfaitement retranscrit par l’instauration de l’atmosphère anxiogène dès le départ. Comment Georg et Anna échangent, d’un ton sans émotion ou presque, comme s’ils se contentaient de décrire. Puis l’arrivée de Paul et Peter qui, sans la moindre gêne, s’introduisent dans l’espace vital des personnages, le faisant littéralement voler en éclat et finissant par renverser la situation au bout d’un moment, faisant oublier qu’ils se sont introduits. Enfin, le tout est parachevé par cette absence totale d’espoir et d’échappatoire, que ce soit dans la résolution ou dans les rebondissements ; et le personnage nous le fait très bien comprendre.
Au final, c’est le réalisme avec lequel cette histoire se met en place, avec lequel la violence est dépeinte, avec lequel les personnages évoluent, qui contribue à mettre le spectateur profondément mal à l’aise, et rendant même le film difficile à regarder par moment.
Le casting est globalement très bon. Chacun réussira vraiment à porter son personnage, ses différents aspects, et à renforcer le réalisme avec lequel cette histoire est abordée. C’est typiquement le genre de film visiblement très éprouvant pour les acteurs, et le genre qui nous questionne sur comment cela a-t-il été mis en boîte.
Techniquement, c’est là aussi plutôt une réussite. L’absence quasi-totale de musique (qui se limitera au final presque uniquement à des morceaux diagenétiques) renforce l’atmosphère oppressante et angoissante, rendant le tout que plus terrifiant. Les décors très simples mais parfaitement utilisés pour participer une nouvelle fois à la création de cette ambiance si troublante. Et enfin, il y aura bien sûr la réalisation d’Haneke, avec des plans extrêmement soignés, jouant beaucoup sur plusieurs codes. Sans oublier ses plans presque interminables et fixes qui nous glacent le sang.
Funny Games est donc ce qu’on peut considérer comme un film coup de poing. Son thème, son concept et la façon dont Haneke a mis tout cela en scène en font une œuvre particulière et extrêmement crue. C’est non seulement violent, sans virer dans le gore, mais on y retrouve également les vrais codes de l’horreur en huis-clos. Sauf qu’on n’est pas dans le surnaturel, le fantastique ou la science-fiction, on est dans un réalisme terrifiant.