Dans son réquisitoire aux allures de marathon martial, Park Ki-hyeong dépeint une jeunesse coréenne à la dérive qui essaye de se construire des repères. Et dans un climat assez précaire où les adultes semblent absents, il est bien difficile pour eux d'y parvenir. Et quand ils réussissent à trouver un point d'appui, il se trouve être taillé dans le même bois qu'eux, par conséquent pas forcément porteur de bonnes solutions. Voilà comment, en partant de la création d'une équipe de foot entre amis, cette dernière se laissera glisser dans une spirale de violence incontrôlable, pour sombrer dans un chaos qui se dessine progressivement dès l'ouverture du film uppercut de Park Ki-hyeong.
On pourrait rapidement juger High Gangster comme un film rustre uniquement fait de violence, mais ce serait bien réducteur. Il est au contraire plutôt intelligent dans sa façon de transformer la violence en appel à la révolte. Révolte contre une société qui semble laisser ses jeunes errer dans l'espoir d'un jour trouver son chemin, révolte aussi contre la nature humaine qui bien souvent se réfugie dans ses pulsions primaires lorsqu'elle n'a pas de solution. Ce groupe d'amis qui est le sujet de Gangster High ne parviendra jamais, malgré la réflexion souvent poussée de son chef, à trouver une alternative aux enchaînements gauche/droite qui leur semblent être le seul moyen de se faire respecter. En ce sens, le personnage de Lee Sang-Ho est le plus intéressant. Présenté comme l'élève modèle, bon en tout, qui semble promis à une belle carrière militaire, à l'image de son père, il va sombrer malgré lui, partagé entre révolte et amitié, dans une violence pulsionnelle dont il ne pourra dévier jusqu'à franchir le point de non retour.
Et quel point de non retour. Graphique en diable, sec et rageur, la séquence finale impressionne. Mise en scène avec un coup d'oeil aiguisé et une fougue non contenue, elle conclut les affrontements de belle façon. Certains lui reprocheront d'esthétiser à outrance une violence extrême, les autres y verront une métaphore assumée pour illustrer le destin gâché de ce meneur intelligent et tempéré. Lee Sang-Ho l'a bien compris, il se devait de finir son film avec panache, pour qu'on ne puisse lui reprocher d'avoir emprunté quelques raccourcis d'écriture sans raison. Le cinéaste nous rassure bien vite, dès que l'ultime symphonie du maître se met en marche, que son ballet funèbre final épouse les sonorités classiques qui la composent, c'est une magnifique poésie noire qui se dessine à l'écran. On finit la séance complètement KO, toutes nos réserves à propos des facilités du script s'envolent avec l'abandon total auquel se livre le charismatique Jung Kyoung-Ho lorsque son personnage se laisse complètement aller à son animalité