Garde alternée
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Je le confesse ici avec honte : la bande-annonce de Garde alternée m'avait drôlement amusé et m'avait même extirpé quelques rires aguicheurs. De nature plutôt bon public, m'esclaffant facilement, pouffant régulièrement devant les blagues les plus gênantes, et même parfois les plus outrancières, je décidai de laisser sa chance à ce film qui méritait au moins de mettre à l'écran de nouveau Valérie Bonneton qui, malgré son jeu caricaturalement égal, me réjouit toujours beaucoup, ce qui dans le cinéma français se révèle être un exploit. Pourtant, et comme souvent en France, la bande-annonce légèrement drôle n'est qu'une porte d'entrée vers un film insipide, absolument dénué de drôlerie, médiocre et purement commercial. Ce n'est pas que le film n'est pas amusant, il l'est, puisque le spectateur le regarde jusqu'au bout, mais là où l'abus rencontre le malaise, à cet endroit précis naquit le film français humoristique. Rien n'est crédible, rien n'est fin, rien n'est original : ce film est une orgie au sens littéral du terme où se bousculent les pires clichés, le mauvais goût et même la gêne. L'idée même ne laissait que peu de place au doute : le partage d'un homme entre son épouse et sa maîtresse, cela ne pouvait être exploité que de manière effroyablement conventionnelle et lourde. Ce film d'Alexandra Leclère est un des plus mauvais films de l'année 2017, repose sur d'éternels poncifs, des situations habituellement absurdes, des gags vus et revus d'une infinie vulgarité, d'autant plus grossière qu'elle est involontaire.
L'humour ici n'a même pas comme fonction d'envoyer un message, tant le polyamour, l'homosexualité et même l'adultère sont évoqués non pas avec des stéréotypes, mais avec des préjugés ignobles d'inculture et de bêtise. Parfois même, le film frôle l'homophobie puisque ses personnages homosexuels, outre le fait d'être des clichés sur pattes (en manque de cul, éternellement célibataires, prédateurs sans morale), sont un formidable cadeau fait à la Manif' pour tous et aux homophobes les plus crasses. Le scénario est évidemment, bien que parfois prêtant à sourire (ce qui est tout de même le but), totalement impossible. Les dialogues sont écrits avec les pieds, les personnages mal incarnés et certaines scènes réussissent le fait notable de nous conduire à la pensée du suicide. L'humour est donc ici existant par lui-même, et le film serait réussi s'il réussissait tout de même à faire rire. Or, le spectateur ne rit pas. Il sourit parfois, et encore heureux. Mais jamais il ne rit, parfois même, il s'ennuie, jusqu'à la plus grande affliction. En fait, le spectateur a honte, honte du cinéma français, et de ses réalisateurs cupides, prêts à sacrifier tout l'art du monde pour l'argent des pauvres badauds, qui paieront leur place de cinéma pour financer l'homophobie et la bêtise. Pauvre France.
Créée
le 11 juin 2018
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