« Qui est Gatsby ? »
Après de longs mois de promotion et de matraquage médiatique, c'est la question qui résonne d'un ton prometteur dans le crâne du spectateur. « Qui est Gatsby ? ». Le début du film entretient ce mystère alléchant ; Qui est donc ce riche parvenu qui règne sur New-York ? Dès ses prémisses, le long-métrage de Luhrmann nous livre un élément de réponse. En dépit des apparences, assurément, ça n'est pas Charles Foster Kane...
Gatsby le magnifique version 2013, c'est en premier lieu un casting à l'allure de « dream team » mené par un Léonardo Di Caprio épatant qui, comme le bon vin, se bonifie avec les années. Une prestation mystérieuse et torturée épaulée par l'excellente Carey Mulligan et le non moins talentueux Joel Edgerton.
Le problème, c'est qu'on a l'impression d'observer des poupées dans un décor en carton pâte. La réalisation de Luhrmann est trop ambitieuse, trop grande pour l'échelle humaine, trop grande pour les émotions, trop grande pour le cinéma...
Voix off omniprésente, rythme effréné d'un montage épileptique, mouvements de caméra trop grandioses, trop lisses, trop impossibles. Les partis pris du réalisateur agissent comme un train gargantuesque qui transporte le spectateur d'une scène à l'autre, s’arrêtant parfois une fraction de seconde afin de nous lancer des effets 3d kitschouille, bref de la poudre aux yeux.
Ce train infernal nous emporte dans un fracas furieux nous montrant, à la manière d'un guide touristique, le strict nécessaire. On est transporté, bringuebalé de scènes en scènes dans un décor onirique sans pour autant pouvoir rêver... Rien n'est suggéré, tout est montré, presque démontré. C'est ce qui fait dérailler le potentiel dramatique et émotionnel du film. Le jeu des acteurs n'y change rien, on est trop éloigné des protagonistes pour ressentir quelque chose à l'égard de ces figurines, se débattant frénétiquement dans le coffre à jouet géant de Luzmann.
L'effervescence de ce New-York des années 20, avec ses excès d'exubérance et de pauvreté, avait pourtant un potentiel de résonance énorme avec notre époque. Seul les arrangements musicaux, plutôt intelligents, permettent d'entrevoir un lien, pourtant évident, entre ces deux siècles.
Et pourtant, Gatsby à tout d'une grande histoire d'amour hollywoodienne à l'imaginaire poétique nourrit. Mais ce qui méritait d'être beau, fin, bouleversant d'émotions est saccagé par la main prétentieuse et condescendante du réalisateur.
Oui Gatsby est magnifique, au sens étymologique du terme. Trop magnifique... C'est cela même qui, paradoxalement, rend le film insignifiant.
« Qui est Gatsby ? »
La réponse est enfin là, devant nos yeux. Gatsby, ce n'est pas Léonardo Di Caprio...
Gatsby, le mégalomane, l'imposteur... C'est Baz Luhrmann.