Sadao Nakajima est un réalisateur qui a signé des yakuza-eiga sur quatre décennies, du milieu des années 1960 à la fin des années 1990, traversant l'âge d'or de la Toei aux côtés d'un certain Kinji Fukasaku puis en entretenant la flamme d'un genre arrivé à bout de souffle dès la fin des années 1970, avec notamment quelques grandes fresques sur le sujet : la trilogie Japan's Don (1977-1978), Conquête (1982), le remake de Theatre of Life avec Fukasaku (1983) et plus tard, toujours dans la même veine, ce 1750 jours de turbulences. En quelque sorte Nakajima est à la fois un pionnier du genre et le chainon manquant avec la vague de renouveau des années 1990 et 2000 (Kitano, Miike, Takashi Ishii...).
Moins ambitieux que ses précédents films de 2h20, aux castings assez dingues par ailleurs, on reprend ici un peu les mêmes éléments, à savoir la crise de succession au sein d'un puissant clan de Kobe après la mort de son boss historique et la sanglante guerre qui s'ensuit. Comme dans Conquête, une Mariko Okada très digne et respectée interprète la veuve, tout en essayant d'imposer ses vues sur la succession et les dernières volontés de son défunt mari. On pourrait presque situer ce 1750 comme la suite de Conquête, d'ailleurs l'environnement de Kobe et le titre du film évoquent instantanément (mais sans le nommer) le Yamaguchi-gumi qui a traversé quatre ans de guerre interne après la scission de deux factions.
Moins connus, mois charismatiques que ceux de la génération précédente (à noter tout de même une courte apparition de Tetsurô Tamba), les acteurs font néanmoins le job dans ce film qui se veut réaliste en adoptant parfois le style documentaire, avec quantité de détails et de descriptions, tout en maintenant un rythme élevé et une tension quasi-constante. En conclusion, alors que le public de l'époque boudait un peu ce genre qui n'était plus dans l'air du temps, Nakajima continuait à livrer une production constante très fidèle à l'esprit jitsuroku des années 1970. Ce 1750 ne déplaira pas aux nostalgiques de l'âge d'or.