Un génie en informatique crée un superordinateur organique, dit Proteus, pourvu de la somme de toute la connaissance humaine et d’un incomparable nombre de circuits et de possibilités, y compris d’autonomie et d’évolution. Dans le cadre d’une conscience planétaire et d’une globalisation des responsabilités, l’idée est de lui confier les mécanismes technologiques, industriels, financiers, alimentaires, encyclopédiques, scientifiques, faire de lui une entité de maitrise et de référence, à laquelle les hommes trouveront sans doute leur compte en s’y subordonnant. Un funeste cauchemar s’active évidemment dès qu’il prend le contrôle du laboratoire du savant et de la résidence automatisée où se trouve son épouse.
Derrière ce haletant spectacle, et malgré le style vieillot d’il y a 40 ans, cette aventure de science-fiction philosophique nous interroge sur deux sujets de vie fondamentaux. D’abord le prix à payer d’abandonner son autonomie et sa liberté de penser et de décider, la servitude volontaire, la paresse qui conduit à l’esclavage et à la torture de sa propre vie. Mais surtout celui de la fondamentale nature du vivant et du pensant. Si les 100 milliards de neurones de notre cerveau humain nous permettent le raisonnement, la créativité, la poésie, la morale ou la volonté, pourquoi un ensemble plus complexe, même artificiel, ne pourrait pas revendiquer les mêmes aptitudes, y compris la domination, l’incarnation, la reproduction et l’immortalité ?
Eternel sujet de la machine vivante, fascinant depuis Descartes et Pascal, 17ème, De la Mettrie, 18ème, Philip Dick et son « Blade Runner » de 1966, Arthur Clarke et son 2001 de 68, et plus récemment les extraordinaires Autòmata ou Ex-machina. Ce film visionnaire de 1977 fait preuve d’une lucidité déjà glacée en imaginant les super-entités virtuelles qui gouvernent aujourd’hui ce pauvre monde.