Gros coup de coeur pour ce film que j'ai trouvé assez brillant et qui arrive à proposer un film jouant constamment sur la tension entre humour parfois assez noir, angoisse palpable et charge sur le racisme sous couvert horrifique. Du coup difficile d'en parler sans spoiler un peu.
Enfin même mettre en spoiler toute la chronique.


Donc si vous ne l'avez pas encore vu, ne lisez pas ce qui suit.


C'est bon ?
On est ok ?


Alors allons-y.


Je trouve le film assez riche. Il y a tout autant la dénonciation des divers racismes possibles (white-black énoncé précédemment tout comme black-black) mais aussi la caricature en elle-même d'une famille white trop bien sous tous rapports et forcément bourgeoise avec incursion thriller/science-fiction. Pas étonnant donc que la caricature soit parfois poussée dans le rouge avec le personnage de Caleb Landry Jones qu'on repère d'emblée comme psychopathe. Ou bien que ou bien que Rose ait ce "statut" au sein de la famille : jeune fille de bonne famille, trop belle pour être vraie, elle devient donc l'appât idéal pour les mecs dans cette configuration. Son vrai visage n'en est que plus surprenant par la suite même si le réalisateur, Jordan Peele en rit volontiers : C'est une prédatrice qui écoute volontiers Dirty Dancing aux écouteurs tout en buvant son petit lait. Elle mange même des petits bonbons, c'est trop kawaïïï --insère des petits coeurs ici. Non je déconne.


Et le film fait très fort pour constamment jouer sur le malaise sans qu'on s'en doute... Juste en y repensant en grattant le vernis. Par exemple la scène de la réception qui met bien le malaise en étalant sans complaisance une version réactualisée du marché des esclaves tel qu'il était mis en scène dans le passé. Ici Chris est une bête de foire, on l'observe, on le tâte (si, si), pour un peu on lui écarterait la bouche pour regarder sa dentition. Et le fait que la copine ne remarque rien met encore plus la puce à l'oreille/gêne d'autant plus.


Il y a quelque chose de très fort dans le fait d'admirer les personnes de couleur noire pour vouloir se l'approprier, l'assimiler (les références aux Femmes de Stepford ainsi qu'à L'invasion des profanateurs de sépultures sautent d'emblée et sont d'ailleurs revendiquées par le réalisateur). L'admirer pour mieux l'avoir. C'est évidemment la réplique sur Obama mais aussi la séquence où l'on montre le grand-père, battu par Jesse Owens aux J.O de 1936. Grand-père qui dans une nouvelle enveloppe corporelle retrouvera en plus d'une seconde jeunesse, des perfromances sportives à nouveau inégalées !


Le sort de Chris se joue juste après dans cette scène de Bingo glaciale puisqu'elle est en fait un détournement de mise aux enchères. C'est le conservateur et collectionneur d'Art qui finit par remporter la mise. Et c'est cela dit tout bénéfice pour lui quand on y pense vu qu'il n'avait plus la vue... Une facilité qui m'embête plus que le coup des photos pour ma part mais c'est subjectif.


Et puis il y a ce basculement au 3/4 du film qui me plaît beaucoup et continuer d'assumer pleinement la filiation série B inquiétante. Outre les références déjà évoquées précédemment j'ai pensé à des séries comme The Twilight zone ou Au delà du réel où dans un épisode de la série des années 60, un complot chinois se mettait en place avec un processus d'absortion via un masque imitant le visage d'un occidental de haut rang et bien placé dans le paysage politique américain.


Ici, ce sont les chutes en hypnose dans le gouffre de l'oubli qui m'y ont fait penser. Cette mise en scène de chute dans le vide presque comparable au terrifiant néant qui va digérer ses victimes dans Under the skin, très bien mis en scène... avec un petit côté télé poltergeist sauf que ce n'est pas la gamine qui s'approche de l'écran mais Chris qui s'en écarte...


et quoi de mieux que de faire de la télévision le symbole d'une porte ouverte sur l'âme de quelqu'un ? C'est cette télé qui forme un écran qui s'éloigne dans la vue de Chris avant que dans la première séance, le personnage de Keener lui ferme les yeux donc éteigne momentanément l'écran. Et c'est donc logiquement une télé presque similaire à celle de Videodrome, vieille et pourtant un peu intemporelle qui va dévoiler à un Chris attaché le but de cette opération terrifiante (le coup du petit film 60's promotionnel qui reprend les grandes étapes de promotion d'un village type est assez drôle)...


Et évidemment les acteurs sont tous fabuleux sans exception.
Vraiment très bien.

Nio_Lynes
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Top films 2017, Les meilleurs films de 2017 et Les meilleurs films des années 2010

Créée

le 15 mai 2017

Critique lue 345 fois

Nio_Lynes

Écrit par

Critique lue 345 fois

D'autres avis sur Get Out

Get Out
BobChoco
5

I told you so

Bon, pour ceux qui n'ont pas vu le film, passez votre chemin. Ce qui m'a attiré de prime abord, c'est le "genre : horreur" annoncé par la com sur la toile couplée au pitch: "Chris est noir. Chris...

le 22 mai 2017

140 j'aime

15

Get Out
Behind_the_Mask
7

I am not your negro

Wahou ! C'est que c'était bien, finalement, Get Out ! Behind est soulagé car il craignait d'avoir payé sa place pour un pamphlet politique qui aurait dépassé son genre de départ, que le masqué...

le 4 mai 2017

121 j'aime

7

Get Out
Clairette02
8

Man, I told you not to go in that house.

Des bienfaits de ne pas trop se renseigner sur un film... Je suis allée voir Get out en pensant qu'il s'agissait d'une comédie, portant sur le racisme aux Etats-Unis. Pas sûr que le terme de...

le 1 mai 2017

102 j'aime

8

Du même critique

Un grand voyage vers la nuit
Nio_Lynes
5

Demi voyage nocturne

C'est toujours frustrant de voir un film avec de grandes possibilités gâchées par plein de petites choses. Et en l'état, même s'il est rare que je me livre à l'exercice de la chronique négative, je...

le 21 févr. 2019

23 j'aime

6

Üdü Wüdü
Nio_Lynes
9

Cri barbare

Üdü Wüdü comme les deux albums qui suivent sont de nouvelles directions pour Magma qui cesse momentanément ses trilogies en cours. Le premier volet de Theusz Hamtaahk est par exemple fini dans son...

le 25 avr. 2017

21 j'aime

2

If I Could Only Remember My Name
Nio_Lynes
10

Musique au crépuscule

« Quelques jours après le début des répétitions, je passai par Novato pour rendre visite à David et Christine. Ils habitaient une grande maison de campagne avec Debbie Donovan et un certain...

le 29 août 2018

17 j'aime

25