Ridley Scott est donc devenu à son tour une tête de turc.
A peu près depuis Prometheus, parce qu'il osait inscrire la saga Alien dans une direction apportant du sang neuf qui a profondément défrisé le fan.
Napoléon représentait une sorte de bouquet final, tellement c'était peu respectueux, bourré d'anachronismes et que si d'aventure tu aimais l'engeance, c'est que t'étais un gros idiot qui surnote.
En lisant les premiers retours concernant Gladiator II, c'est à peu près la même chose. Sauf que le médiocrité était décrétée de longue date sur la base d'une simple bande-annonce bourrine portée par un rap anachronique.
Soit un sommet du sens critique, tout comme se précipiter day one, ou même en avant-première, histoire sans doute de bien confirmer son aversion ainsi que le nouveau bouillon critique.
Un tel accueil hostile pour une suite d'un méga hit rappelle au masqué celui réservé un peu plus tôt dans l'année à Joker : Folie à Deux. Todd Phillips confirmera surement que les attentes démesurées sont très rarement satisfaites, tout comme il n'est jamais commode de se lancer dans ce genre d'entreprise.
La similitude pourrait même être déportée sur le sujet de chacun des films, illustrant le déclin d'une société, la colère qui irrigue le peuple et son rapport aux idoles, à leur symbole et leur héritage.
Mais tandis que Todd Phillips semblait s'inscrire contre son Joker initial, Ridley revient au mythe, a priori, en mode « plus ». De variété dans l'action, dès lors qu'il offre une bataille navale en guise de mise en bouche, comme avait pu le faire 300 : La Naissance d'un Empire, ou qu'il multiplie les combats exotiques dans l'arène, ne se contentant plus de simples tigres, et donnant vie à une séquence abandonnée du premier opus faisant intervenir un rhinocéros.
La partie grand spectacle est donc pour le moins assurée.
Sauf que Ridley Scott change de focale, histoire sans doute d'éviter l'écueil du simple remake, en s'intéressant finalement beaucoup moins à son nouveau gladiateur qu'aux intrigues politiques visant à la déstabilisation de Rome. Comme si le réalisateur voulait se démarquer d'un classique dont il savait pertinemment qu'il ne pouvait en rééditer l'impact. D'autant plus qu'il faudra avouer que Paul Mescal n'aura jamais l'envergure, et encore moins le charisme animal, de Russell Crowe, tandis que Joseph Quinn et Fred Hechinger, tout en cabotinage réjouissant, ne pourront cependant jamais approcher la folie de Joaquin Phoenix.
Et là, c'est Denzel Washington qui vole littéralement le film à chacune de ses apparitions, de son sourire carnassier, de son énergie malicieuse, de sa détermination à précipiter la chute d'un régime, à l'écho tristement actuel.
Ridley Scott filme encore une fois l'histoire d'un déclin : des idées politiques et moral, et la décadence des élites piétinant tant le symbole de ces héros que les grands idéaux d'un passé glorieux. Et si cette suite revenant de très loin n'était pas une absolue nécessité, elle fait plutôt honneur à l'héritage de Maximus tout en conservant son goût de l'épique et du grand spectacle.
Behind_the_Mask, bourre l'arène.