À mes yeux, il y a deux types de films abordant l'accompagnement d'une personne en fin de vie. La mauvaise, un film insupportable, larmoyant et monotone qui n'hésite pas à sortir les violons pour faire pleurer les chaumières : Nos étoiles contraires. La bonne, utiliser ce parcours balisé comme une toile vierge qu'on détourne avec une certaine créativité : Me and Earl and the Dying Girl. Ce second long métrage de Han Yan fait partie de la seconde catégorie.
Go Away Mr. Tumor est une adaptation d'un webcomic très populaire en Chine crée par Xiong Dun. Porteuse d'une leucémie, la jeune illustratrice s'était lancée dans ce dernier projet pour partager son expérience à l'hôpital avec beaucoup de légèreté et d'autodérision. Elle s’est éteinte en 2012 à l’âge de 30 ans.
L’histoire embrasse cet héritage et débute avec le 29e anniversaire de Xiong interprétée par la sublime Bai Baihe. Autant j’avais trouvé l’actrice insupportable dans Monster Hunt, autant là, je trouve qu’elle colle parfaitement au ton décalé du film. Pour la jeune femme, rien ne va plus : elle vient de se faire virer, son petit-ami la trompe et elle se retrouve à l’hôpital après un petit malaise. Mais ce n’est pas assez pour désarçonner Xiong, extrêmement positive et solaire. En salle de réveil, une seule chose l’inquiète, son apparence, parce que oui, elle a décidé de jeter son dévolu sur le médecin qui la prend en charge.
Ce que j’aime dans le film c’est sa capacité à nous faire décrocher un sourire même lors de passage absolument pas « glamour ». Notamment grâce à esthétique parfois très cartoonesque. À plusieurs reprises, nous rentrons dans les pensées de Xiong à l’imagination débordante. Une perte de connaissance se transforme en une scène de Walking Dead où elle élimine une horde de zombies (littéralement, son colloque étant fan de la série), une rencontre avec son médecin en une scène romantique surannée, etc. C’est totalement kitsch et surjoué, mais l’alchimie fonctionne plutôt bien. Le film parvient également à distiller de la légèreté dans la vie réelle que ce soit avec ses amis proches ou ses compagnons de chambre.
Pourtant, le film ne tente jamais de rendre la leucémie amusante, il se contente de montrer qu’on peut s’amuser en l’ayant contractée. Plus la fin approche, plus le film prend naturellement une tournure plus dramatique sans jamais déraper dans la facilité. Xiong garde sa personnalité excentrique jusqu’à la fin, allant même jusqu’à délivrer un message posthume dégoulinant de positivité. Son « départ » reste, somme toute, assez sobre, souligné avec un bel arrangement de Knockin On Heavens Door.
Go Away Mr. Tumor est petit OVNI qui parvient à rendre « feel-good » un événement dramatique. Le film s’est hissé à une bonne place au box-office local et a même été sélectionné comme entrée nationale aux Oscar.