Chaque jour est plus sombre que le précédent lorsque vous constatez avec désarroi tous ces gens qui vous exaspère par leur attitude, exécrable pour certains, affligeante et crétine pour d'autres. Quelques fois même la mode se charge de nous apporter quelques perles qui polluent notre dictionnaire. Mais enfin une lumière divine se charge de les punir et d'alléger le monde de quelques mentalités qui nous débecte, et à cela, ne serait-ce que de pouvoir jouir d'une simple vision à l'écran, je remercie messire Goldthwait de m'avoir offert 1h40 de vengeance silencieuse et intime.
Bobcat Goldthwait est l'incarnation même de la satire qui me correspond. Pendant 1h40, le réalisateur offre le droit au spectateur de se moquer à ses côté d'une population qui souvent nous insupporte. Bien qu'une large population en prenne pour son grade, le réalisateur ne s'attaque pas à tout le monde, ce qui s'avère dommage, mais rien ne peut nous glorifier plus que de constater que nous ne faisons pas parti de la population pointée du doigt.
En effet, allant du comportement intolérable de certaines personnes qui vont dans les salles obscures jusqu'au cancer télévisuel qu'on nous force à avaler, on peut dire que pour passer au travers les mailles du filet, il faut être sacrément irréprochable (rien qu'en appréciant Green Day on est fiché). Et c'est ça qui est bon. À une époque où la télévision multiplie les émissions de téléréalités jusqu'à ne plus savoir quoi en foutre et où les expressions toutes plus idiotes les unes que les autres se démultiplient à une vitesse folle, le réalisateur, inconnu au bataillon auparavant, affiche clairement son ressenti vis à vis de tout cela à travers son film. En prenant un héros plus que banal, il prend à parti de la manière la plus simple du monde une très grande majorité de la population. Le mettant dans une position progressivement dégradée, il va en justifier ses actes futurs qu'il interprétera comme étant vos propres désirs refoulés. Il fera du spectateur le héros du film à travers le personnage qu'il a crée. À moins que vous ne fassiez vous-même parti de la population critiquée, vous prendrez un malin plaisir a approuvé les actes du héros et à le félicité de cela. Bien que toute cette fanfaronnade soit totalement immorale, elle n'en sera pas moins justifiée et approuvée à cause du caractère qui semble tellement cliché mais qui est en fait tellement réel.
Et alors que vous êtes bien enfoncé dans votre siège vous vous inquiétez sur la possibilité, du fait que le scénario vous semble si réel, que le héros le soit lui aussi et qu'il soit également dans la salle, vous ferez donc immédiatement attention de bien vérifier que vous ne gêniez pas les autres.
Honnêtement, pour parvenir, à travers un film, à communiquer autant avec le spectateur, il faut un sacré talent malgré que le sujet s'y porte à merveille.
Malgré tout, bien d'autres clichés ne seront pas mentionnés, à mon grand regret, ce qui laisse présager, soit que le réalisateur n'est qu'à moitié comme vous l'espériez, soit qu'il n'ose pas trop se mouiller de peur que quelques portes lui soient fermées devant le nez. Il faut avouer que le film prend clairement position et ne laisse que peu d'empathie envers les esprits blâmés. Et bien que relativement peu de caractères soient concrètement présentés et mis en scène, une multitude d'autres sont mentionnés. Par ailleurs, le film propose une multitude de personnalités à détester, mais se contente de seulement quelques vengeances qui iront très vite à l'exécution pure et simple de la victime, alors que là où ces personnes affectent notre quotidien, il eut été bien plus intéressant de filmer comment nous aussi pourrions empoisonner le leur.
God Bless America cependant n'est pas uniquement une satire de la société (américaine entre autre, mais pas seulement), c'est aussi une satire du cinéma puisqu'elle présente au second degré quelques scènes de meurtre, notamment la plus flagrante, celle de la voiture, la première mort. La mise en scène parodie clairement tous ces films d'actions où les gens deviennent des tueurs nés sans avoir jamais tenu une arme de leur vie ou réalisant des exploits sans accros alors que n'importe qui le faisant n'y parviendrait pas aussi facilement. Et malgré un genre associé à la comédie, Bobcat parvient très largement à mettre en scène un évènement sérieux et au second degré qui plus est.
Au final, God Bless America est une comédie vraiment très intéressante qui vaut d'être vue au moins une fois. Malgré une fin quelque peu bâclée et trop simpliste, laissant place à un dénouement assez improbable, cela n'aura aucun véritable impacte et la fin étant très sympathique, ce maigre défaut est sans importance.
Ce film est la preuve que même en Amérique, la satire existe encore, et pour cela, je ne peux que recommander ce film.
Notons par ailleurs que ce film, produit et réalisé aux États-Unis il y a plus d'un an, présenté au festival international de Toronto, n'a pas bénéficié de sortie officielle au cinéma, uniquement dans quelque salles, et fut diffusé dès le lendemain à la télévision. Ce n'est que début octobre 2012 qu'il arrive jusque nos salles françaises et reste programmé plus d'un mois. Cela montre que le film n'a pas fait l'unanimité en Amérique (et pour un film qui porte le nom de leur chant patriotique, c'est un comble) alors qu'il semble être beaucoup plus apprécié en France.
Ceci prouve d'une part des propos jugés gênants pour nos amis outre-atlantique, d'autre part d'un certain anti-américanisme français et d'autre part encore que certains partis pris semblent avoir du mal à être acceptés pour mettre plus d'un an pour traverser l'océan. En tout cas, c'est une belle victoire, tous domaines confondus que le réalisateur partage avec nous.