Gods of Mexico
Gods of Mexico

Documentaire de Helmut Dosantos (2022)

Beau travail photographique mais mauvais documentaire

On se demande ce qu'on vient de voir, une fois Gods of Mexico terminé. À mon sens le travail de Helmut Dosantos s'apparente davantage à un effort photographique que cinématographique, et on verrait bien un recueil de clichés noir et blanc organisé selon les mêmes thématiques géographiques, à la manière d'un Ansel Adams ou d'un Sebastião Salgado. Ou alors il faut découvrir ce film au cinéma, pour que l'hypnose et le choc esthétique fasse son effet — à l'image de l'expérience Homo sapiens du génie formaliste Nikolaus Geyrhalter. En l'état, au vu de l'extrême hétérogénéité du contenu de la partie centrale principale qui zappe frénétiquement d'une configuration baroque à l'autre, il est difficile de ne pas ressentir l'effet de la "photo filmée".


Gods of Mexico est censé être un film qui "suit la résistance à la modernisation dans le Mexique rural et qui nous rappelle qu'il est encore possible de vivre en accord avec notre essence en tant qu'êtres humains". La dernière partie de cette description a de quoi effrayer le plus ouvert des matérialistes, mais disons que la beauté et l'incongruité des scènes-photos égrainées pendant 1h30 (essentiellement en noir et blanc, à l'exception de deux longues séquences en couleur) permettent de laisser cette dimension-là en sommeil. Sans pour autant désirer en toutes circonstances le réalisme documentaire le plus exemplaire qui soit, ce film reste malgré tout prisonnier d'un voile légèrement désagréable lié à la recherche permanente d'une sensation d'exotisme qui peut susciter une gêne, légère mais persistante.


La qualité de la photographie reste évidente, pour qui apprécie les contrastes N&B forts et les géométries de cadres ultra-léchées : ainsi le collage de paysages, au sein desquels des personnes, des travailleurs évoluent, pourra faire son petit effet. La séquence (en couleur) au sein des marais salants aménagés est à ce titre proche de l'hypnose, avec ses multitudes de petits carrés délimités, ses variations de couleur autour du blanc, ses plans aériens, ses mouvements d'outils synchronisés... Mais pour tout le reste, beaucoup de scènes resteront incongrues et inexpliquées, dépourvues de contexte, une vieille femme dans la jungle, un couple nu dans une cave, soulignant le caractère un peu abstrait de la démarche. Un travail colossal de près de 10 ans, qui à mon sens aurait gagné à être moins dans la recherche du plan parfait sur des thématiques trop variées et davantage dans le souci du pragmatisme et de la concision.


https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Gods-of-Mexico-de-Helmut-Dosantos-2022

Créée

le 10 sept. 2024

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Morrinson

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