Lézard et Spectacle...mais pas trop quand même...
J'ai une confession à faire: à part le Godzilla de Emmerich fin des années 90 (oui je sais...) et les séries animées inspirées du monstre, je suis un peu un profane en la matière. Non, je n'ai pas vu le film d'origine de 1954 ainsi que toutes les suites où le lézard géant affrontait tout un zoo de créatures, tout aussi géantes.
En revanche, ça reste un lézard géant qui détruit des villes et qui crache le feu de l'enfer nucléaire et ça, bah c'est super cool. Rassuré par le premier trailer du film de Gareth Edwards, c'est donc le coeur rempli d'espoir et les étoiles plein les yeux que je suis allé visionner le dernier né de la saga.
Autant le dire tout de suite, j'ai été passablement déçu et les flammes bleues ardentes expulsées par la bête auront enflammé beaucoup de choses (quoique...) mais pas mon coeur. Mais pourquoi donc?
Attardons nous (leaule...) sur le scénario un moment: y a un énorme lézard radioactif qui traîne quelque part dans l'océan, qui a la classe, et qui ressurgit parce qu'apparemment il y aurait d'autres grosses bèbètes méchantes dans les parages......Voilà.
S'il est évident qu'un film de ce type peut se permettre le luxe de faire passer le scénario au second plan, encore faut-il le faire bien. En effet, le film essaie tant bien que mal de mettre en avant ses personnages humains sans doute pour apporter une sorte de profondeur à tout ceci...mais sans jamais y arriver. Notre héros n'a pas beaucoup de lignes de texte, représente le héros américain badass qui ne craint rien (alors que merde gars, des bestioles de 100m de haut qui détruisent des villes quoi). Ses amis scientifiques sont rapidement dépassés par les événements, prétextant des raisons philisophico-rien pour justifier tout ça sans rien apporter à l'histoire, sans rebondissement, rien. La présence de Bryan "Walter White" Cranston aurait pu apporter un soupçon d'intérêt au camp humain qui passe la totalité du métrage à subir, mais la partie de l'histoire le concernant est tellement anecdotique que ça tombe à plat.
En bref, le clan des humains nous est présenté comme une faction bien fade, bien inintéressante, avec des personnages plats et on est loin par exemple de la performance d'un "Dents de la Mer" avec un trio impeccable et attachant.
En revanche, si on est un peu honnête avec soi-même, nous ne sommes pas venus voir des péquenauds taper la causette. On a payé pour voir le roi des monstres en action, balancer des coups de queue (pas de connotation à voir ici), crier à la mort comme quand tu te tapes le petit orteil sur un angle de meuble et vomir le feu salvateur. Et là, et c'est plus grave, l'expérience est en demi-teinte.
En effet, si la réalisation, propre et travaillée, est une des forces du film, elle devient aussi sa plus grande faiblesse. Gareth Edwards est assez ingénieux pour arriver à maintenir le suspense quant à l'apparition du monstre en trouvant des subterfuges pour le masquer (une porte qui se ferme en vue subjective, un nuage de fumée, des débris etc). Si au début du film, on salue cet effort qui ne fait qu'alimenter le suspense chez le spectateur et faire grandir l'impatience de voir la bête dans toute sa majesté; vers la fin, après une énième reprise de cette petite astuce, on a juste la lassitude qui s'installe. Le film s'appelle Godzilla et au bout d'un moment, on aimerait voir GODZILLA! Ce qui est dramatique c'est que les apparitions du roi des monstres, quand elles sont franches et honnêtes, sont très réussies et j'ai eu le frisson d'extase lors du premier rugissement ou lors du premier jet de flammes.
Mais tout ceci est encore trop timide, trop rapide, trop contenu. Car pour résumer, nous avons un film qui n'est pas rattrapé par ses personnages (ce qui aurait excusé le temps relativement court des vraies apparitions de Godzilla) et qui n'est pas totalement sauvé non plus par l'aspect badass que nous aurions clairement pu avoir pour ce type de production. Je passe sur les quelques incohérences et facilités du scénario qui font un peu tiquer sans que cela soit toutefois réellement problématique.
Pour conclure ce pavé, on ressort du film avec l'impression qu'il a le cul entre deux chaises. Il essaie mais ne réussit jamais complètement.
Il essaie de rendre ses personnages intéressants mais n'y arrive pas.
Il essaie de faire dans le grand spectacle mais n'y arrive pas totalement.
A trop nourrir l'attente, Gareth Edwards la transforme en frustration, sentiment que l'on ressentira à la sortie de la salle.
Un énorme "Dommage" donc pour le Godzilla cru 2014, qui malgré ses gros défauts, était quand même bien réalisé. Préférez-lui, dans le même genre, l'extraordinaire (n'en déplaise aux détracteurs) Pacific Rim de Guillermo del Toro sorti l'an dernier.