Alors que les festivaliers de Cannes commençaient à piquer du nez, l’ouverture de Good Time a soudain électrisé le Grand Théâtre Lumière.


Après un prologue d’une belle singularité, focalisé sur les défauts d’élocution d’un individu visiblement limité mentalement et son appréhension à recevoir de l’aide d’un professionnel, la brutale irruption de son frère (Robert Pattinson, à corps perdu dans son rôle) vient donner le la d’une virée aussi frénétique que désorganisée.


On sait les frères Safdie, auteurs notamment du précédent Mad Love in New York, capables du meilleur lorsqu’il s’agit de prendre le pouls d’une jeunesse rebelle et de ses soubresauts. Portée par la partition vibrante et électro de Oneohtrix Point Never, les vingt premières minutes du film sont parfaites. Il se passe enfin quelque chose de véritablement palpable en terme de cinéma : les personnages sont riches d’une authentique épaisseur, leur maladresse les dote d’une complexité qui les voit se cogner à tout bout de champ dans une ville qui respire, qui s’offre et barre le passage dans un même élan.


On pense, bien entendu, au modèle pesant d’Un après-midi de Chien pour cette conjonction entre la criminalité et les catastrophes de l’amateurisme, ainsi que pour l’attachement qui en découle pour les personnages. Good Time est nerveux, énergique, et distille cette authenticité âpre qui fait la patte des frères Safdie.


Mais lorsqu’on commence sur les chapeaux de roue, reste à maintenir un cap et un rythme. On ne peut reprocher au scénario de vouloir jouer la carte de l’improvisation et des accidents, en cohésion avec les personnages : la nuit blanche qui suit prend cette fois des airs d’After Hours, oscillant entre une comédie branque et une tragédie un peu minable, les décisions prises n’étant jamais les bonnes.


La conviction des réalisateurs comme des comédiens reste entière, mais la mécanique s’essouffle, et l’errance des personnages semble contaminer l’œuvre elle-même. Des trips sous acide aux courses folles, des rencontres éphémères aux coups improvisés, on perd de vue ce qui semblait annoncé au départ, et qui promettait une belle intensité : la relation fraternelle, entre dépendance et domination, complicité et autodestruction. Les Safdie privilégient l’événementiel, jusqu’à l’outrance, au détriment de la complexité des individus qu’ils avaient pourtant si bien su tremper en quelques séquences inaugurales.


Good Time n’est pas un mauvais film, et pour qui voudra voir Pattinson se débattre dans une nuit blanche un peu badass, le plaisir sera sans doute au rendez-vous. On ne peut s’empêcher de penser que toute cette agitation nous fait manquer un rendez-vous autrement plus intense.

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le 13 sept. 2017

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Sergent_Pepper

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