Chaque année (ou presque), au festival d'Annecy, sont présentés des films d'animation teen movie japonais, avec des adolescents cons comme les blés, ne révolutionnant jamais vraiment l'animation en tant que tel, mais qui parfois, arrivent à être de jolis surprises. Il y a trois ans, c'était 7 Days War, un joli plein de poésie sous une épaisse couche de niaiserie, et il y a deux ans, c'était l’exécrable Josée les tigre et les poissons, qui avait même fait l'honneur d'être le film d'ouverture du festival. En attendant quel sera le film qui reprendra le relais en 2023, on peut découvrir en salle celui de 2022, Goobye DonGlee qui, dès les premières images, attirent l'attention. Le Japon est culturellement connu pour être introverti et renfermé sur lui-même, peinant à s'ouvrir au monde, ce qui rend toute proposition extrêmement intéressante lorsque celle-ci met en avant l'occident ou l'étranger dans son décor ou récit. Du coup voir une cabine téléphonique londonienne, au milieu d'une forêt étrangement verte... cela créé instantanément une image forte qui attise la curiosité, mais pour quel résultat ?
On sent un élan de liberté véritablement rafraîchissant qui se dégage de ce film. Il y a une simplicité dans la manière d'aborder les choses, un peu à l'image des personnages qu'on va suivre dans leurs voyages initiatiques. En à peine quelques scènes, on s'attache très vite à ces personnages élevés au grain, mais qui transpirent d'un naturel et d'une simplicité d'esprit qui les rend très vite attachant. On est alors plus à même d'accepter des extravagances relationnelles, qui auront pour but de renouveler des dialogues de drame japonais dont on connaît toutes les ficelles. Cette simplicité d'esprit fait qu'on arrive à mieux rentrer dans leurs délires et rire avec eux, lorsqu'un personnage va désamorcer une discussion tendue avec une imitation d'un professeur de la vieille école, ou encore lorsque ces rois de la débrouilles cherchent à ouvrir une boite de conserve en rappant les bords contre un rocher. Mais plus qu'à travers les personnages, c'est dans sa forme et sa narration qu'on peut voir que tout le film semble être épris d'une liberté folle. On comprend très vite que l'essentiel est d'être réunis avec ces personnages et qu'il est bon de traversé des kilomètres en forêt pour apprendre à mieux les connaitre, se ressourcer, et prendre du plaisir en randonné. On est préservé des tropes habituels avec des enjeux émotionnels et un but précis qui guiderait trop le récit, car l'essentiel du film se veut comme une déambulation dans la forêt avec le plaisir d'être avec ces personnages qu'on apprend à découvrir de plus en plus, ainsi que des paysages que le personnage principale immortalisera avec son appareil photo. Si l'animation peut paraitre "simple" car n'allant pas chercher des techniques trop extravagantes par rapport à l'animation 2D habituel des drames japonais, elle n'empêche pas les idées de réalisation qui montre qu'un vrai auteur est à l’œuvre. On retrouve le motif du personnage enseveli, que ce soit par l'eau ou par du fumier (ça s'invente pas), où l'image vient suggérer une situation métaphorique par le biais de sa mise en scène. Cela a pour effet de montrer des phases dans le développement d'un personnage qui va passer d'un stade où celui-ci sera acculé par les problèmes, à une situation plus vivable. Mais plus que certaines idées de mises en scènes, les graphismes sont particulièrement soigné, même dans des scènes pouvant très vite être compliqués à animer comme un moment de libération où un personnage se sent comme un chef d'orchestre au dessus d'une falaise, et où la caméra va tourner autour de lui dans un mouvement aérien montrant les sentiments désinhibé de celui-ci face au paysage et à sa liberté. Goodbye DonGlee est extrêmement intéressant et très prenant tant il sait capter l'attention sur des détails.
Le soucis est que, paradoxalement, par manque de libertés artistiques ou d'espace d'expression, le film est cantonner à ce à quoi doit ressembler un drame japonais selon ce qui est voulu par les producteurs. On voit cela à travers une tentative vaine de scénario qui n'apporte rien, si ce n'est des réponses pas nécessaires, et une intrigues qui amènent le film à se justifier d'être ce qu'il est. S'il y a une raison pour laquelle ces trois jeunes partent en forêt, et que fort-heureusement cela ne se limite qu'à une excuse pour sortir à l'aventure, le film essaye de créer des sous intrigues, des enjeux qui n'apportent rien aux personnages, et empiète même sur notre empathie vis-à-vis d'eux. On est sur un récit où des jeunes essayent tant bien que mal d'oublier les problèmes et de se recentrer sur l'essentiel, et on a un film qui accumule les sous intrigues et les éléments scénaristiques qui alourdissent les personnages, ça ne peut pas coller. Mais plus que les sous-intrigues qui s'accumulent, c'est surtout le format qui n'est absolument pas adapté au film et à ce qu'il souhaite véhiculé. On est sur un film qui dure 1h20 alors qu'avec un récit aussi déambulatoire et sensoriel vis-à-vis de ses personnages et du voyage, on devrait plutôt arriver à un film de minimum 2h pour pleinement profiter des différents voyages que le film veut nous proposer. Ajoutez à cela les différents enjeux et les différentes sous-intrigues, on doit arriver à un film assez consistant de 3h à la Drive My Car de Ryosuke Hamaguchi ou encore à la Lost city of Z de James Gray. Seulement ici, on ressent très fortement l'étiquette pré-établi du drame d'animation japonaise, et on sent que quoi qu'il en coûte, le film ne doit pas dépasser les 1h20. Ce qui engendre des coupes dans le film, parfois visibles et très peu sexy, pressant le tout à se terminer au plus vite, rushant les scénarios les plus complexe ou les relations les plus secondaires, et nous laissant perdu face à un film qu'on comprend qu'à moitié. On souhaite profiter de ces personnages et du simple fait de les voir marcher dans la forêt ou de rigoler autour d'un feu de camp, kit à ce que cela dure 2h voire plus, mais ce n'est pas en accumulant les relations amoureuses non avoués ou les problèmes de santés qu'on ne prendra même pas le temps d'expliquer calmement qu'on sera plus intéressé. Lors de sa dernière partie, on nous montre une excursion en Islande qu'on aimerait suivre plus en profondeur, mais qui se retrouvera résumé à des moments clés de l'aventure alors que toute la magie du film se repose, justement, sur l'aventure sans réel objectif si ce n'est sortir et prendre l'air. On sent presque, par moment, une politique de la surenchère avec notamment des phases musicales qui sont parfois bien introduites, mais qui sont généralement des moments ne servant qu'à renforcer encore plus un aspect commerciale et consommable du film qui se doit de s'inscrire dans la longue ligné des drames étudiants japonais en animation. C'est un peu dommage car par moment, on a de réels bonnes idées qui marchent et qui permettent des moments de légèretés musicales, notamment lors d'une phase de chant autour d'un feu de camp. Les trois ados sont ivres au coca, se remémorent leurs années au collège, et vont pour chanter une chanson qu'ils ont appris. Malheureusement, dans un soucis d'uniformité, la chanson "doit" s'accompagner d'une danse, "doit" être millimétrée et soignée avec la musique en arrière plan, alors que tout aurait pu prendre une ampleur supérieur dans une forme de naturalisme, sans fond sonore, et dans une gestuel plus hésitante et moins prise de tête.
Au final on est pas tant déçu du voyage et du film, tant le film se veut dans une forme efficace de simplicité. Malheureusement le format du teen movie japonais empiète de trop une réalisatrice très prometteuse dont on attend déjà la prochaine création originale avec, on l'espère, un peu plus de marge de manœuvre.
11/20
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