Filmer le chaos

Bien qu'il en ait l'air, Gorge cœur ventre n'est pas qu'un film plutôt vide d'une cinéaste trop jeune n'ayant pas grand chose à dire ou à raconter, si ce n'est dénoncer le mauvais traitement affligé aux animaux condamnés à l'abattoir pour finir dans nos assiettes. Car s'il s'était simplement agi de cela, il n'aurait pas fallu à Maud Alpi un format si long, un simple spot publicitaire estampillé vegan aux images choc (pas aussi atténuées que dans son film) aurait eu un meilleur effet, si bien qu'elle nous aurait éviter toutes ces scènes tellement ressemblantes, répétitives jusqu'à l’écœurement, prises avec une maladroite caméra, perdant assez vite de leur force avec l'usure.

En effet, il y a quelque chose qui va au-delà du simple message contestataire, indigné et anti-spéciste. Quoi donc? Difficile à dire, tant le discours de la jeune cinéaste manque de structure, d'écriture, de voix, de souffle, de fond. En dépit de ces lacunes criardes, elle parvient néanmoins à créer une ambiance de fin de monde, où règnent les ruines, la destruction, la mort absurde et aveugle. C'est ce qu'on peut sauver de son film, guère plus – ajoutons à cela quelques scènes choc (le bœuf brûlé, la naissance du veau), d'autres photos réussies (images du chaos) et une syntaxe insistant (lourdement) sur les comparaisons.

Un Prix Louis-Delluc du premier film généreusement attribué à une cinéaste qui doit encore faire ses preuves.