Dans Grâce à Dieu, François Ozon a pris la décision, courageuse et déterminée, de traiter avec une précision implacable le sujet de la pédophilie dans l'Eglise catholique, à travers un fait divers qui fait aujourd'hui la Une des journaux : le procès du père Preynat, accusé d'abus sexuels sur mineurs, et celui du cardinal Barbarin, accusé d'inaction face à des faits connus de tous au sein du diocèse.
Pendant deux longues heures, le réalisateur met en scène les démarches de trois anciennes victimes, désormais adultes mais à jamais marquées par les abus du père Preynat, contre l'Eglise et son assourdissant silence. Trois hommes, aux profils sociologiques et psychologiques bien différents, vont unir leur action pour faire vaciller un édifice millénaire.
Le scénario est d'une qualité indéniable, montrant tous les aspects d'un thème d'une immense complexité (le regard compatissant ou au contraire agacé des proches, le silence coupable des familles, l'ambivalence des médias, le doute dans la foi, le réveil quelque peu hypocrite de l'institution religieuse). Les acteurs sont également remarquables, interprétant avec force les cicatrices de leurs personnages.
Malgré cela, le film de François Ozon est profondément ennuyeux et apathique. La faute à une absence totale de mise en scène et de cinéma. Souhaitant sans doute être le plus fidèle et respectueux possible des faits, le réalisateur se contente de mettre en image une succession d'événements, de procédures, d'étapes marquantes dans cette longue quête. Le film se perd ainsi dans le documentaire sans avoir la force du réel et manque cruellement de dramaturgie. Quelques moments de grâce peuvent traverser le film mais cela ne suffit pas à effacer une déception face à un sujet qui aurait mérité bien plus qu'une mise en image bien paresseuse.