Film discret sorti en 2002 réalisé par Robert Salis, Grande Ecole pourrait être présenté comme un film brouillon, une sorte de marivaudage entre étudiants d'écoles supérieures françaises, de discours timide sur la lutte des classes et les inégalités, ou encore un drame sur la sexualité et le coming-out.
Le film est tout cela à la fois, mais aussi autre chose.
Adapté de la pièce de théâtre éponyme de Jean-Marie Besset écrite en 1995, le film donne, dans les dialogues notamment (je pense à la scène de confrontation entre 5 des 6 personnages principaux), et par l'interprétation des comédiens, une théâtralité qui ne se cache pas. Cette théâtralité, mise en avant de façon bien plus explicite dans les moments de rêves ou de fantasmes (qui sont des petits instants de poésie, avec des jeu de miroir pour un plaisir exclusivement visuel), aidés par des voix-off, des surimpressions ou un montage plus dynamique. Ce sont les éléments les plus cinématographiques qui nous rapprochent de cette théâtralité.
Le cinéaste, également écrivain sur la question du nu, met en avant cette idée des corps qui se livrent, qui se montrent, qui s'explorent, qui se confrontent, qui s'opposent et qui s'aiment (la scène du générique sous les feux d'artifices de Carcassonne, le moment de fantasme au miroir entre Paul et Mécir, ou encore, beaucoup plus beau, la scène de l'équipe de water-polo sous les douches [HOT] ).
Le scénario souffre cependant, il est vrai, de larges faiblesses narratives, qui rendent parfois les relations ou certains aspects du film superflues. Les comédiens tirent une bonne épingle du jeu, notamment sur le côté théâtrale des dialogues, parfois à la limite de l'exagération.
Mention spéciale au regretté Jocelyn Quivrin, ici bien jeune, et qui montrait déjà ici un talent monstre, faisant bien de lui un des jeunes acteurs français prometteurs de cette époque.
Un film, donc, qui contrairement à ce qu'on aurait pu croire, n'anticipe absolument pas La Crème de la Crème de Kim Shapiron, sorti en 2014, mais dont on pourrait percevoir un lien dans les premières minutes, avec ce qui semblerait comme l'inévitable discours de bienvenue des grandes écoles.