"La Sombra de la Ley" (rebaptisé de manière très laide "Gun City" en France) est une très belle surprise qui nous vient de l'autre côté des Pyrénées.
Ce film narre les aventures d'un policier, ancien soldat durant la Guerre du Rif, chargé d'épauler la brigade du renseignement de Barcelone en 1921 pour retrouver des armes de guerre volées à bord d'un train. Le décor est posé : anarchisme, syndicalisme, grèves, combats féministes, pègre, ripoux ... Le moins que l'on puisse dire c'est que "La Sombra de la Ley" a un contexte original et peu vu au cinéma.
C'est donc l'occasion de se pencher sur l'Espagne durant ce qu'il a été appelé "les années bolchéviques" durant lesquels des républiques bolchéviques ont été proclamées dans certaines villes (!), l'état d'urgence a été déclaré à Barcelone et l'armée est intervenue violemment. Une période très troublée et passionnante dans laquelle situer un film policier avec des mafieux et des ripoux était particulièrement fin.
"La Sombra de la Ley" est donc très intéressant. Mais ce que je retiens de ce film en particulier, c'est son aspect visuel. Il a reçu à juste titre 3 Goyas techniques.
Ce film est truffé de plans sublimes. Le directeur de la photographie, Josu Inchaustegui, est ultra-talentueux. Les plans avec les jeux de lumière, la fumée, les ombres, les couleurs, etc ... Tout est sublime. C'est la très grande force de l'oeuvre.
Les costumes aussi sont très très beaux, notamment ceux des danseuses de cabaret où les personnages se rendent régulièrement.
D'ailleurs, les plus belles scènes s'y déroulent. C'est l'occasion de faux plans-séquences où le montage est fait de manière très subtile et qui sont particulièrement impressionnants.
Mais tant d"éloges et pourtant pas la note maximale, me direz-vous. Effectivement. Mais cela s'explique par 2 raisons :
- Le film est un peu long à mon goût par rapport au scénario. Je pense qu'une bonne demie-heure en moins aurait permis d'accélérer un peu le rythme. D'autant plus que l'on navigue entre le film noir, le film policier, le western, le film politique et le drame social donc on avait de quoi ne pas perdre le spectateur en route.
- Les personnages sont trop manichéens. On peut classer chaque personnage en "bon" ou "méchant". La zone grise n'existe pas dans ce film et c'est bien dommage car il est intelligemment construit et fait appel à la réflexion du spectateur pour tout le reste.
Pour autant, je sais que je retiendrai de "La Sombra de la Ley" cette maîtrise du visuel, qui me semble pouvoir être un exemple pour beaucoup d'oeuvres.