Un de mes éclaireurs, Izops, m'a conseillé ce petit bijou belge, sorte de road-movie comptant trois handicapés en quête d'un bordel spécialisé en Espagne, leur seule possibilité de se défaire de leur virginité. N'étant pas très cultivé en cinéma belge, à part quelques chefs-d'œuvre connus tels que "C'est Arrivé Près de Chez Vous", je me lance dans le visionnage sans grande attente.

& pourtant, la qualité est au rendez-vous ! Tout d'abord, pourquoi la métaphore des singes de la sagesse dans mon titre ? Eh bien, chacun correspond à l'état ou au caractère de chacun des handicapés : l'un entend du mal puisqu'il apprend que sa maladie est devenue plus agressive ; l'autre ne peut s'empêcher de dire du mal, d'ouvrir sa grande gueule lorsque cela n'est pas nécessaire ; enfin le dernier est tout simplement incapable de voir, mais est très sensible aux affects des deux autres.
Ces acteurs sont très bons, par ailleurs : tous font preuve d'un naturel irréprochable, sont très convaincants. On est très vite immergés dans le vif du sujet grâce à l'humanité qu'ils témoignent. Le film en lui-même n'a absolument rien de prétentieux, & sait aborder des thèmes qui dérangent sans ressentir le besoin d'aller jusqu'aux clichés. Là où le film est très réussi, c'est à travers la manière dont il parvient à nous maintenir entre le rire & les pleurs : tout est finement équilibré, & de la même façon, on n'a ni pitié, ni compassion pour les handicapés, seulement une certaine amitié, humaine, sincère, & non purement cinématographique. En fait, le casting n'est pas composé de mannequins ou de vraies belles gueules (le grand paralysé ressemble quelque peu à Grand Corps Malade, & celui atteint de cécité est un clone de Gilbert Montagné) : tous sont relativement classiques, voire moches, sans vouloir le cacher, & pourtant on n'atteint pas le stéréotype, on est heureux d'avoir enfin des acteurs choisis pour leur talent & non pour leur photogénie à l'écran.
La réalisation est très honnête, & la mise en scène sans grand artifice ; pourtant Enthoven parvient à créer un climat tendu ou relaxé lorsqu'il le désire, & c'est à cela qu'on reconnaît un vrai cinéaste, selon moi. Encore une fois, je tiens à insister sur l'équilibre de l'intrigue, dans laquelle chaque scène semble soupesée dans le but de ne pas ennuyer le spectateur. & même si parfois l'image prend des tournures de téléfilm, on peut difficilement s'en plaindre, puisqu'on est tellement pris dans l'histoire que ces quelques passages ne sont décelés qu'après le visionnage complet.

Ainsi, la Belgique prouve une fois de plus la possibilité de ses talents. "Hasta La Vista" est une perle du cinéma, sans prétention aucune. Les émotions de ce film sont si bien maîtrisées que son genre se situerait dans l'espace entre les deux mots de l'expression "comédie dramatique".
Satané
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 24 mai 2012

Critique lue 1.8K fois

29 j'aime

6 commentaires

Satané

Écrit par

Critique lue 1.8K fois

29
6

D'autres avis sur Hasta la vista

Hasta la vista
Satané
8

Mizaru, Iwazaru & Kikazaru

Un de mes éclaireurs, Izops, m'a conseillé ce petit bijou belge, sorte de road-movie comptant trois handicapés en quête d'un bordel spécialisé en Espagne, leur seule possibilité de se défaire de leur...

le 24 mai 2012

29 j'aime

6

Hasta la vista
Ulysses
8

Tétraplésir

On pouvait effectivement s'attendre au pire lorsque le pitch présentait une comédie belge sur trois handicapés partant en Espagne dans le but de se dépuceler. Au final, c'est une bonne surprise, un...

le 28 mars 2012

20 j'aime

1

Hasta la vista
Andy-Capet
8

De la sexualité comme besoin maslowien

Même s'il y a deux trois choses convenues, le traitement du sujet et son humour vaut largement le voyage. Pour étayer mon propos sur l'intérêt à voir ce film, je vais en parler d'un autre. Il n'y a...

le 3 nov. 2012

12 j'aime

Du même critique

Utopia
Satané
4

Légère déception

Si les premiers instants de la série "Utopia" étaient surprenants & d'une authenticité indéniable, il ne lui a cependant pas fallu très longtemps pour déchanter. S'étalant sur six malheureux...

le 21 févr. 2013

52 j'aime

8

Elephant
Satané
4

Cinéma indépendant : expérimentation ou fainéantise ?

C'est ce que je me demande. Ce film est chiant. Même s'il dure à peine plus d'une heure, on s'ennuie, on est las dès le début, car chaque scène est très lente. Heureusement qu'on n'est pas devant un...

le 11 sept. 2011

41 j'aime

12

Pokémon Green
Satané
10

Ma toute première prise de drogue

"Pokemon Green" n'est pas le premier jeu-vidéo auquel j'ai joué, mais il s'agit quand même de mon initiateur au monde geek. Je suis né en 1991, & à l'époque, j'habitais dans le Pas-de-Calais. Entre...

le 30 août 2011

38 j'aime

11