Plus qu'un documentaire, c'est un journal intime. Pas celui d'un homme (il ne sera jamais question de sa vie privée ici), mais celui de l'artiste qui, malgré son succès et l'admiration sans bornes de dizaines millions de personnes à travers le monde, doute encore de son talent et craint l'échec.
Pas de faux semblant ni de fausse modestie, c'est le portrait d'un homme simple et humble qui crève ici l'écran, un homme bouleversé par la mort de son meilleur ami, Isao Takahata, qu'il l'avait poussé à sortir de sa retraire pour faire ce "dernier" film, qui dés lors deviendra presque une œuvre testamentaire lui permettant d'entamer son deuil. Une œuvre qu'il aimera et maudira pendant plus de 7 ans, souffrant de ne pas être parfait, dessinant et jetant sans cesse ses story-board pour les refaire, à la recherche d'une émotion que lui seul connait, jaillissant de son passé, de ses souvenirs.
On y découvre un Miya-san sans artifice, se livrant avec une étonnante spontanéité (surtout quand on connait le formalisme sociétal des japonais), nous laissant pénétrer dans son processus créatif et entrevoir son travail "raté" qui partira à la poubelle, et surtout, voir ses failles, ses craintes, ses peines (c'est juste déchirant de le voir aussi souvent répéter que son ami lui manque), ses combats et son jusqu’au-boutisme ahurissant.
Pas d'artifices dans la réalisation non plus. L'image est laide, prise sur le vif, et le montage chaotique comme l'esprit de Miyazaki qui court dans tous les sens, parce qu'il ne s'agit pas ici de mettre en valeur autre chose que l'art de la création, dans toute sa complexité, sa dureté.
Bref, un témoignage incroyable du travail d'artiste d'une manière générale, entièrement voué à son art, sacrifiant souvent tout, juste pour aller au bout de ses idées, et qui, après tant de souffrance, n'a qu'une envie en tête : recommencer.