Haze
6.6
Haze

Moyen-métrage de Shinya Tsukamoto (2005)

Exit l’urbanisme tokyoïte, cette fois Shinya Tsukamoto choisit de sonder le cœur même de la machine, ou plutôt un égout suintant malodorant dans lequel un individu amnésique tente de s’extirper à l’aide de ses dents, ou bien en se mutilant sur des parois de pics acérés. A l’instar du Cube de Vincenzo Natali, le cadre est truffé de pièges mortels que le personnage devra tenter d’éviter tout en cherchant une issue de secours. Haze est à l’origine une commande du festival coréen de Jeonju destiné à intégrer une anthologie de segment (Digital Short Films by three Filmmakers) exploitant les spécificités technique de la caméra Digital de Sony. Le réalisateur l’utilise ici pour tourner en basse luminosité et obtenir une image aussi sale que l’eau croupit dans laquelle il patauge, et ce de manière à mieux exploiter le hors-champs et densifier un environnement totalement artificiel : quelques planches de bois crépit de peinture grise et une simple poubelle remplie d’eau serviront par exemple à simuler l’ascension d’une conduite aussi étroite que le cul d’une bonne sœur.


Le format et la taille de la caméra lui permette de retrouver la mobilité de ses premiers tournages en 16mm et ainsi renforcer le sentiment d’oppression permanent et de promiscuité. Le qualificatif de film « underground » ne se sera jamais aussi bien prêter qu’ici. D’une certaine façon, Shinya Tsukamoto revient à ses thèmes de prédilection, à la différence près que ce n’est plus la machine qui investit l’humain comme dans Tetsuo mais bien l’humain au cœur d’une machinerie implacable qui réduit les corps en morceaux. Après avoir abordé un virage commercialement plus viable dans sa carrière, le réalisateur revient à la nervosité hystérique de ses premiers films avec des gros plans et un montage cut percutant, on retrouve également cette sensation d’enfermement à la fois physique et psychologique. Au-delà de la facture technique, l’intérêt de ce court métrage réside dans le sentiment de claustration exacerbé par ce décor cryptique et l’interprétation fiévreuse de Tsukamoto que l’on verra feindre de douleur et tenter de s’extirper d’un charnier de corps en décomposition avant de nous gratifier d’une chute insolite aux relents de cuvette de chiotte, dans l’esprit des bizarreries nippone.


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Le-Roy-du-Bis
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le 7 juin 2024

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