Voilà bien la première fois que je suis embêté à ce point devant la caisse de ma salle de cinéma. En effet, encore pire qu'Eyjafjallajökull, qui passait avec des cours intensifs de diction option islandais, un Rrrrrr ! simple mais qui n'évitait pas le ridicule et autres titres anglophones parfois imprononçables, franchement, que dire à la charmante caissière ce coup-ci ? Hache hache hache hache ? 2 H majuscules, 1 h minuscule, 1 H majuscule ?
Et si Beezell était de l'autre côté, comment éviter ses réponses en forme de jeux de mots, du genre "H-é menu" ou encore un truc du style "on ne vend pas de drogue ici, putain" ?
Heureusement, j'optais finalement pour un salvateur "2 places pour la salle 3, mademoiselle".
Tout cela pour être étonné, dans un premier temps, du casting international quatre étoiles affiché par un film français, réalisé par celui qui avait exécuté le sympathique La French. Car réaliser que Jason Clarke affiche sa tête de salaud consommé dès les premières minutes, là où on ne l'attendait pas, cela fait bizarre, tout comme la présence des radieuses Rosamund Pike et Mia Wasikowska.
Le spectateur est donc d'ores et déjà séduit par ce qu'il lui est mis sous le nez, d'autant que HHhH, dans sa première partie, se concentre sur son personnage titre en le faisant évoluer du minable de seconde zone, gibier de tribunal militaire, en parfaite ordure à la solde du reich, de par sa rencontre avec celle qui deviendra sa femme. Nazi de la première heure, c'est elle, avec son sourire désarmant et son autorité, qui sèmera finalement sur cette terre vierge les semences du mal. Avant de glisser au second plan, éclipsée par l'ascension fulgurante de son Reinhard au sein du régime. L'élève, sans nul doute, a dépassé la maîtresse, abandonnée sur l'autel de la réussite et du fanatisme. Tandis que parallèlement, les horreurs du régime, sa barbarie, sont montrées sans concessions, sèchement.
Jusqu'à ce que HHhH revienne sur le flash de l'attentat, qui l'ouvrait dans un choc quasi primitif. Comme si Cédric Jimenez voulait revenir sur le carrefour narratif mis en place, cet instant où tout se noue, où tout se joue. Avant de s'attarder, de manière un peu abrupte, sur les préparatifs de la machination, vue du côté de résistance. Exit Heydrich et ses contradictions, le haut dignitaire dessiné dans sa success story et sa froide détermination. Ici, HHhH, s'il conserve sa réalisation superbe, sa reconstitution léchée et son interprétation sans faille, devient plus brouillon, parfois mollasson, avec des personnages qui nous semblent paradoxalement plus éloignés alors qu'ils sont engagé du bon côté.
Et l'on se souvient alors instantanément de La French, qui souffrait exactement du même problème de rythme, malgré ses qualités indéniables et un réalisateur qui se révélait fort capable derrière la caméra.
Un tel défaut dans la structure retenue pour fonder HHhH, s'il n'est pas immédiatement rédhibitoire, fera cependant clairement ressentir les deux heures du film, bien que le spectateur sera incapable de dire, à la sortie de la projection, les passages qu'il aurait fallu couper pour dynamiser l'ensemble. D'autant plus que le film reprend immédiatement du poil de la bête en dépassant sa scène clé pour en montrer les conséquences cruelles, la mise à genoux de la Bohême-Moravie, ou encore de ce village martyr dont sont originaires les comploteurs. Le passage dans l'église achèvera quant à lui à traque des fuyards de manière spectaculaire, désespérée et abominable, dans toute l'efficacité dont est capable le régime nazi.
Si HHhH réussit à redresser la barre dans cette dernière ligne droite maîtrisée et de haute volée, dommage que Cédric Jimenez n'ait pu maintenir ce niveau de qualité sur la durée, défaut récurrent d'une filmographie pourtant séduisante qui augure de forts belles choses s'il venait à être gommé.
Allez, encore un effort, Cédric, ce sera sans doute pour le prochain.
Behind_the_Mask, qui ne touchera plus à la H.