Himizu
7.4
Himizu

Film de Sion Sono (2011)

Je connais tout, sauf moi-même

Je connaissais Sion Sono pour son cinéma plutôt survolté, il faut dire alors qu’en lisant le pitch d’Himizu, je m’attendais à une exception dans la filmo du japonais, une sorte de drame social sur l’après-Fukushima, beaucoup plus calme, où Sono ne se laissait pas aller à des excentricités comme dans Love Exposure ou Why don’t you play in Hell.

Et ben il faut dire que Himizu m’a surpris, parce que le réalisateur japonais ne s’est pas du tout calmé pour ce film, et d’un côté tant mieux parce que c’est ce qu’on aime chez lui. Mais Himizu n’en reste pas moins un drame social comme on peut se l’imaginé. Les premières images du film nous confrontent directement avec la réalité du séisme du 11 mars 2011 qui reste l’une des plus grandes catastrophes naturelles de ces dernières années. Les images d’une région complètement ravagés, le tout accompagné du Requiem de Mozart et du poème Je reconnais de François Villon.

Je connais tout sauf moi-même. Voilà une phrase qui peut résumer Himizu.

Car malgré le chaos qu’a engendré la catastrophe, ce ne sont pas les bâtiments qui ont été le plus détruits, mais bien les êtes humains, les habitants.

Himizu, nous raconte l’histoire de Sumida, un jeune collégien de 14 ans qui vit dans une petite cabane avec sa mère, et vit de la location de bateau. Le jeune Sumida qui vit malheureusement dans une famille difficile, entre un père endetté au près de Yakuza qui vient parfois lui rendre visite dans le seul but de lui soutirer de l’argent, ou sa mère qui ramène des hommes et laisse son fils s’occuper de tout, d’autant plus quand elle se casse avec l’un d’eux et abandonne son fils. Sumida se retrouve alors tout seul, enfin tout seul pas vraiment, car il reste quelques gai-lurons habitants dans des tentes autour de sa cabane, et surtout la jeune Keiko Shawaza, une camarade de classe, fasciné par Sumida et qui n’hésite pas à accrocher au mur les citations de son « idole ».
La jeune Keiko qui elle aussi vit dans une famille difficile, avec une mère qui construit une potence dans le seul but de permettre à sa fille de se suicider et lui laisser faire sa vie. Keiko qui va alors entrer dans la vie de Sumida. Ces deux jeunes gens qui sont complètement à l’opposé l’un de l’autre.

Sumida est un jeune homme complètement perdu, chamboulé par la catastrophe, livré à lui-même, qui rêve de mettre fin à ses jours. Il veut essayer de trouver une raison de vivre, c’est pour ça qu’il va essayer de partir dans une sorte de croisade contre les bad guys, en commençant par tué son propre père ( dans une séquence particulièrement bien réalisé), puis il va errer en ville, complètement peinturlurer, et constaté qu’il n’est pas le seul dans ce monde à être perdu.

Keiko quant à elle, représente un peu la joie de vivre, toujours souriante et surexcité, même quand Sumida la traite comme une moins que rien, mais elle a sa technique pour ça, elle ramasse des pierres et les lui jettera dessus une fois sa poche remplie. Keiko qui veut à tout prix donner un sens à la vie de Sumida, elle s’investit dans le business de location de bateau, retape la cabane, distribue des flyers.
Et il y a aussi le vieux Shozo vivant dans un tipi fait de bâche à côté de Sumida, un vieux monsieur qui se considère comme le passé, et qui veut aider Sumida qui représente le futur. Il va donc se lancer dans un cambriolage d’un japonais nazi avec l’aide d’un pickpocket dans le but de payer la dette des Yakuzas. On se retrouve alors à ce moment dans une séquence dont Sono nous a habitué dans ses autres films, et qui rompt un peu avec la dureté du film.

L’un des gros points forts du film reste le duo formé par Shôta Sometani et Fumi Nikaido. Le jeune garçon campe un personnage torturé, dont le mal-être est palpable à tout moment. La jeune fille, dans un autre registre, est elle aussi remarquable. Leurs scènes ensemble sont parmis les plus grandes réussites du film, une réelle alchimie se dégage des deux acteurs, et les séquences finales sont d’une beauté et d’une émotion rare.

La réalisation de Sono est très efficace, sachant joué avec les émotions, dépeignant à la perfection ce tableau ravagé du Japon, tout en nous réservant des moments de dingues comme lorsque Sumida imagine son arrivée chez les Yakuzas. Le plan séquence du meurtre du père est aussi d'une virtuosité impressionnante. Il n'y a pas à dire, il est certainement l'un des plus grands cinéastes asiatiques actuels, sachant utilisé tout ce qu'il a sa disposition pour faire passer son message, l'utilisation de la musique classique étant ici, une nouvelle fois fait avec une précision d'horloger

Himizu est un film touchant, qui parle du chaos destructeur qu’à causé le tsunami de 2011 et surtout de son impact sur les habitants de la région. Sono réalise un coup de maitre, un drame social poignant et marquant, le tout agrémenté de la touche de folie propre au cinéaste nippon.
Bondmax

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