C'est l'histoire d'une erreur : fan de Clint Eastwood, j'entends par hasard qu'il avait eu son rôle dans le film "et pour une poignée de dollars" grâce à l'intervention d'un certain Richard Harrison, acteur ayant joué dans quelques westerns et péplum dans les années 60.
Je fais donc une recherche et je trouve que le film le plus connu de ce cher M. Harrison est Hitman the Cobra ou le Terroriste en français. Par curiosité et certainement sous l'effet d'une substance illicite, je décide de le regarder, attiré par l'affiche qui promet beaucoup d'action.
En version française (je vous vois sourire derrière votre écran).
À la fin du visionnage, je suis resté figé. Quel nanar !
Le film dure 1 h 30, mais 1 h 20 consiste à parler d'un conflit très chiant entre deux camps dans la campagne d'un pays quelconque. Mais vraiment quelconque car a aucun moment on m'introduit le contexte géographique du film. J'imagine qu'on est en Asie.
Oh, le conflit est violent c'est certain, il y a de nombreux morts ... Si seulement le réalisateur n'était pas aussi radin et n'avait pas intégré illégalement un film philippin qui n'a rien à voir avec l'intrigue principale !
C'est chiant, mal filmé et mal éclairé.
Et puis le doublage français est légendaire : les personnages qui parlent sans ouvrir la bouche, des répliques hors normes ("J'ai envie d'une pizza"), mêlé à une "réalisation" immonde avec par exemple des plans de nuit où on ne voit strictement rien (prenez ça Sergio Leone, Michael Mann) !
Bref je m'ennuie sévère, alors que l'affiche me promet un conflit armé entre un blond et des types qui viennent juste d'acheter leur bandana dans une foire.
Mais, il reste sur les 1 h 30 du film, dix minutes qui traite de l'intrigue principale. Et mes amis, je peux vous assurer que ces dix minutes vous n'êtes pas prêt de les oublier !
Tout est absolument mythique. Voici un florilège.
- Le conflit entre notre héros (Philippe , joué par M. Richard Harrison), face à 4 G.I. Joe en toc avec des bandanas de couleurs menés par un homme moustachu (Mike) qui veut venger son frère tué par Philippe : quel scénario !
- Les décors de "jungles" avec une table de pique-nique : kamoulox !
- La stupidité des méchants : 4 contre 1, mais on va se séparer parce qu'on est un commando d'élite.
- Les nombreux faux raccords : le fameux je pars à gauche puis j'arrive à gauche de l'écran. Luc Besson tu peux aller te rhabiller avec ton école de cinéma, le réalisateur il en a vraiment rien à péter.
- Le dialogue dans le combat final où je n'ai pas pu m’arrêter de rire et qui a lui seul vaut le visionnage du film. Ce dialogue dépasse l'entendement. Il y a quelqu'un qui a pondu ce texte, sans se poser la moindre question, en se disant certainement que c'était un dialogue ultra sérieux. D'ailleurs cela m'amène au dernier point qui fait rentrer ce film dans la catégorie des nanars.
- Le côté ultra sérieux des acteurs. Mike en fait des caisses avec des roulades, des regards perçants, des sauts, tandis qu'Harrison il est pas là pour déconner, il a le regard de tueur, il va lui botter le cul. Bon par contre il est pas très malin, il attend bien 5 minutes pour se rendre compte qu'il peut l'abattre en un coup. Et ça marche en plus, Mike reste figé de stupeur !
Et là c'est beau, Harrison se retourne pour contempler le parc heu la jungle, la musique trop saturée se lance et le film se termine.
Quel fin, quel court-métrage de génie !
Bon, je mets une étoile parce que le réalisateur a utilisé (illégalement, j’imagine) des musiques de Genesis.
Tenez une petite anecdote : le réalisateur est devenu professeur de cinéma à la Hong Kong Film Academy ! J'espère qu'il montre ce film à tous ses étudiants pour leur expliquer ce qu'il ne faut pas faire lorsqu'on est réalisateur ...
Maintenant, je donne des cours académiques, ce qui m'oblige à lire des ouvrages théoriques sur le cinéma. Désormais, je sais en quoi consiste l'activité de scénariste car je connais tous les aspects de la fabrication d'un film. Avant, quand il me fallait lire ces bouquins, je me disais "Ouh la ! Qu'est-ce que c'est encore que ce machin ?!"
C'est un vrai nanar qui se regarde entre amis pour bien rigoler et qui vous fera dire que finalement, votre premier court-métrage fait avec un vieux caméscope n'était pas si mal que ça !
Je conclus sur deux citations de Richard Harrison, parlant de "et pour une poignée de dollars".
Sergio Leone insistait pour que je tienne le premier rôle.
Les producteurs m'ont dit que ce ne serait pas un bon film, et comme j'avais d'autres offres j'étais contre...Leone m'a alors suivi, il est venu sur le plateau où je travaillais et m'a observé de loin. Finalement, les producteurs ont à nouveau demandé à me voir et, après leur avoir répété que je ne jouerai pas dans leur film, ils m'ont lu les noms de trois acteurs de Hollywood qu'on leur avait envoyés. Comme ils ne les connaissaient pas, ils m'ont demandé si je pouvais leur en recommander un. Je les connaissais tous les trois.
Mon choix s'est porté sur Clint, simplement parce qu'il savait monter à cheval.
Ma plus grande contribution au cinéma est peut-être de ne pas avoir fait "Pour une Poignée de Dollars" et d'avoir recommandé Clint Eastwood pour le rôle.
Merci Harrison !