Une petite ville s'insurge contre le fait que l'autoroute fraichement construite n'a pas de sortie pour la desservir, son maire et ses habitants vont tout faire pour que leur ville ne meurt pas, alors qu'elle possède toutes les infrastructures pour accueillir les touristes, dont un magnifique zoo présentant des animaux de la savane. Parallèlement, nous suivons le destin de nombreux automobilistes, éloignés parfois de plusieurs centaines, voire milliers de kilomètres, mais qui vont in fine tous se retrouver dans la petite ville en question. Honky Tonk Freeway (on passera sur le titre français, qui a dieu merci totalement disparu de la belle réédition bluray via JB Thoret - merci encore d'exhumer de telles pépites -) est beaucoup plus qu'un film chorale, c'est un film orchestre, avec des instruments de partout, des sons, des orchestrations, des notes dans tous les sens, une explosion permanente. Ce genre de film peut rapidement tourner à l'hystérie totale, être épuisant pour le spectateur, mais c'est sans compter sur le génial John Schlesinger, cinéaste que j'adore mais dont on parle trop peu, qui orchestre magnifiquement l'ensemble pour lui donner une cohérence et une lisibilité incroyable. Ce film est une fête permanente, un feu d'artifice joyeux et déconnant, qui est toujours à deux doigts de virer au bordel mais qui in fine est un film enthousiasmant et réjouissant. Imaginez le Trafic de Jacques Tati fusionné avec le Nashville d'Altman et le superbe et méconnu They're a Weird Mob de Michael Powell rencontrant les délires de John Landis, et vous aurez une belle idée de ce que peut être ce film vraiment étonnant dans la carrière de Schlesinger. Ce cinéaste anglais a réalisé des merveilles dans son pays dans les 60's, il est l'un de ceux qui créèrent le nouveau cinéma anglais, teinté de naturalisme, avant de devenir l'un des plus grands cinéastes américains des 70's (Macadam Cowboy, Un Dimanche comme les autres, Marathon Man, Yanks), et c'est à l'orée des 80's qu'il réalise ce film fou. Il enchainera encore trois grands films dans les 80's (Le Jeu du Faucon, Envoutés, Fenêtre sur Pacifique). Ce film ne ressemble donc à rien dans sa carrière, sauf éventuellement au Jour du Fléau qui décrit la folie d'Hollywood dans les années 30, mais le film vire totalement à l'hystérie, ce qui n'est pas le cas ici. Belle découverte, d'autant que la mise en scène est pleine de respirations, d'échappées, que le film est incroyablement drôle et irrévérencieux et que la palette de comédiens est incroyable, avec notamment deux actrices de l'époque que j'adore : Beverly d'Angelo et Terri Garr.