Retour à la terre
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le 14 mars 2018
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Mes 2 précédentes expériences avec le cinéma de Scott Cooper avaient été décevantes (Je vous renvoie à mes critiques de "Crazy Heart" et de "Strictly Criminal" pour ceux que ça intéresse.)
Malgré cela, le cas "Hostiles" m'intéressait. De par son sujet, déjà, à savoir la difficile cohabitation entre migrants américains et natifs, l'histoire violente du pays, la question de comment la nation Américaine peut faire face à ce passé peu reluisant, à l'aube du XXème siècle.
Pour Christian Bale d'autre part, qui m'avait déçu dans sa précédente tentative western ("3h10 pour Yuma") et que j'attendais au tournant, connaissant le talent du bonhomme et son potentiel comme "gueule" de l'Ouest Américain.
Force est de constater qu' "Hostiles" m'a agréablement surpris à plus d'un égard.
Sa réalisation, déjà. Je reprochais aux 2 précédents films de Cooper leur aspect "lissé", leur manque de profondeur visuelle empêchant l'immersion dans l'univers des films. Ici, la photographie, bien que soignée, laisse transparaître la violence et la crasse de ce far-west "hostile".
Les plans larges sont magnifiquement filmés, et Cooper n'a pas peur de délaisser l'action et les dialogues pour rendre hommage à ses paysages.
Et puis il y a les deux scènes d'ouverture se répondant parfaitement. Le massacre de la petite famille de fermiers par les comanches est magnifiquement mise en scène. La violence est réelle brute, filmée sans glamour ni complaisance. Le spectateur est littéralement scotché à son siège pendant toute la durée de la course-poursuite.
S'en suit une démonstration toute aussi cruelle de la violence des soldats Américains envers une famille indienne, traînée au sol et enfermée dans des cages comme des animaux.
D'ailleurs, toutes les scènes d'action (la première attaque des comanches, notamment) sont filmées avec un brio et une intensité rares.
Le ton est donné. "Hostiles" sera un anti-western, sans héros, sans actes de bravoure. Seule la violence et le désespoir, l'incompréhension et l'incommunicabilité habiteront les protagonistes et... ah bah non, en fait.
Car si le film démarre sur des chapeaux de roue et promet un road trip sauvage, réaliste et sans concessions, le spectateur déchante rapidement.
Au contact de son prisonnier, le chef Yellow-Hawk, notre (anti?)héros (Christian Bale), d'abord haineux envers les natifs américains (le premier dialogue entre son supérieur et lui sur la question est d'ailleurs assez jouissif) du fait de ses combats passés, se transforme progressivement en un ferveur défenseur des droits et des traditions de ses anciens ennemis.
Admettons. Pourquoi pas? Le problème c'est que c'est mal amené.
Pourtant, le sous-texte du film est assez intéressant. Le protagoniste se rend-compte que ses anciens amis ayant servi dans l'armée sont tout aussi brisés que lui, et que seul l'acceptation de la modernité, d'une possible réconciliation avec les indiens, lui offrira une chance de s'en sortir, au lieu de suicider ou de finir fou meurtrier.
Sauf que, dans les faits, le retournement du héros, sa progression psychologique, ne sont pas cohérents.
Il en va de même pour le personnage de Rosamund Pike (seule survivante du massacre de sa famille par les comanches), incroyable de justesse lorsqu'elle joue la traumatisée béate, vengeresse, à la limite de la folie (cette scène où elle continue de tirer sur un cadavre d'indien alors que son revolver est vidé est très forte). Mais son évolution psychologique est également mal amenée, à tel point qu'elle se permettra même de vivre une amourette avec son sauveur (Christian Bale).
Le film manque également de subtilité dans ses dialogues. Dès le début, les protagonistes relatent leurs expériences passées de manière maladroite pour que le spectateur comprenne leur psyché. Mais tout est explicité à l'extrême, jusqu'au ridicule, du genre: "Tu te souviens ce jour où un indien t'avait planté une lance dans le ventre et que t'as failli crever?"... Oui, il s'en souvient. PEUT ÊTRE PARCE QU'IL A FAILLI CREVER, JUSTEMENT?
Tout est explicité, aucun mystère ne subsiste quant aux relations qui pourraient éventuellement se nouer entre les personnages.
Et du coup, le film avance comme sur des rails, et du coup, on s'ennuie un peu.
Le spectateur est parfois happé par un moment particulièrement fort, mais globalement, une lassitude se fait ressentir.
Le film se conclue sur un condensé de guimauve et de bons sentiments à faire pleurer.
Christian Bale s'improvise militant et défenseur des minorités face aux rednecks qui veulent déloger notre petite famille indienne de leurs terres. L'échange ressemble à un truc du genre: "Tu sais donc pas qu'c'est pas bien d'être raciste?" Entre incohérence avec la psychologie du personnage et anachronisme majeur, cette scène laisse très dubitatif.
Mais le pire reste la scène finale (que je ne spoilerai pas), cucul la praline, en totale déconnection avec le reste du film, et soutenue par une armée de violons insupportable.
Malgré tout ça, le film est largement regardable. S'il ne tient pas ses promesses, il a le mérite de proposer un début de renouveau pour le "western contemporain" (retour au naturalisme, réflexions sur l'histoire américaine...). Les personnages sont mal écrits mais les acteurs s'en tirent très bien. Les petits rôles de Timothée Chalamet et Stephen Lang sont savoureux. L'action est impeccablement filmée, violente mais pas complaisante. Et tout ça est très beau.
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Créée
le 2 avr. 2018
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