Histoire d'un aller simple, Hostiles s'impose comme une ode au genre western qu'il investit, qu'il anime, qu'il magnifie. Scott Cooper a tout d'un grand et continue de questionner, tout au long de sa traversée, d'où vient l'Amérique et ce qui l'irrigue. Et quoi de plus adapté pour cela que l'utilisation d'un genre qui paraîtra vieillot aujourd'hui, même s'il connait nombre de soubresauts ces dernières années ?


L'Amérique, Cooper la dépeint comme des plus rudes et âpres. Violente, sans concession pour les faibles. Et tandis que la séquence inaugurale tétanise déjà, elle est immédiatement retournée dans un renversement des rôles de bourreau et de victime. Une manière de renvoyer les opposants dos à dos. Sans juger. Sans asséner un quelconque simplisme du discours.


L'entrée en matière est idéale pour définir le personnage a priori dur, renfrogné et rugueux de Christian Bale, totalement investi, pièce principale d'un puzzle des paradoxes qui animeront toute l'oeuvre. Scott Cooper, lui, secoue les lignes de démarcations et les frontières morales dans une odyssée aux accents des plus tragiques et désespérés, au cours de laquelle les inimitiés tendront à se brouiller, les liens à se renforcer et les vieux démons de l'Amérique à ressurgir.


L'ensemble des motifs du western est compilé, tandis que la tension du début de l'aventure, où pèse une menace sourde et omniprésente, cède peu à peu la place à quelque chose d'autre. Au tragique, à l'inéluctable, à la désespérance. Comme un syndrome post traumatique qui s'emparerait de chacun des personnages principaux.


La souffrance, la perte et l'abandon planent sur l'ensemble des membres de cette caravane improvisée, symbole d'un vieux monde en train de doucement s'éteindre à l'aube de l'industrialisation et de la victoire dans la dépossession des natifs de leurs terres ancestrales. Christian Bale voit le monde changer, le sien, petit, tout comme celui qu'il a servi. Car la souffrance est la même des deux côtés de la frontière quand la violence explose et charge, tout comme les traumas.


Hostiles est une réussite dans la mesure où il évolue tout en nuances, tout en donnant à ressentir ce qui agite l'intériorité de chacun des personnages. L'oeuvre jouit de la même manière d'une esthétique magnifique, dessinant aussi bien les moeurs de l'époque que les traditions indiennes avec une certaine justesse sans jamais verser dans un manichéisme outrancier. Le voyage proposé, lui, est aussi intime que grandiose dans les décors dans lesquels il évolue, entre étendues désertiques assommées par la canicule et les paysages plus verts du Nord.


Le feu tragique de Hostiles semble immortel. L'introspection, douloureuse. Le silence lourd de sens. Mais la fatalité tend vers une certaine forme d'apaisement alors que les reliefs de la terre des aînés se dessinent. Une dernière poignée de mains libère et rend à la vie civile. Et le poème de déclamer ses derniers vers exaltant une certaine idée de l'Amérique, dont les échos sonnent comme étrangement familiers.


Dans un grand moment de cinéma.


Behind_the_Mask, journey to the West.

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