Saoirse power

Il m'a fallu un certain temps pour faire l'analogie entre le film de Kevin McDonald et le livre dont ce dernier est adapté.

J'ai en fait lu ce bouquin il y a une éternité qui, outre son titre français clairement pourri ( car mal traduit) ne m'avait pas plus transcendé que ça. Bon, il faut préciser qu'à l'époque j'étais complètement allergique à ce genre de romans aux couvertures girly gerbantes et préférais les trucs tendance gothique pour ados ( ah quelle période faste). Une sorte d'histoire d'amour teenage pseudo apocalyptique avec quelques détails limite sordides ( relations chelous incestueuses, viols etc), voilà le souvenir plutôt périssable que j'en gardais.

Après visionnage de sa transposition à l'écran, mon ressenti est finalement très mitigé, mais donc pas totalement négatif. Le long métrage se révèle en effet avoir quelques qualités non négligeables, à commencer par sa photo impeccable qui illumine le regard lunaire et très expressif de Saoirse Ronan ( jeune actrice à suivre de près, qui sauvait déjà "Lovely Bones" il y a quelques années). L'actrice porte d'ailleurs littéralement le film sur ses frêles épaules de son jeu trouble tout en finesse, et sans manières agaçantes. Le reste du casting- pour la plupart inconnu- est tout aussi convaincant et parvient à nous captiver durant plus d'une heure.

Il y a ensuite la musique composée par Jon Hopkins, ni trop envahissante ni trop absente, qui se contente d'enrober délicatement le film et de laisser planer cette atmosphère éthérée et lugubre à la fois. On se sent successivement subjugué puis mal à l'aise en regardant cette succession d'images, les scènes apaisées puis nettement plus brutales s'enchaînant avec un naturel désarmant. Seuls bémols auxquels on ne pouvait pas échapper dans une production catégorisée "teen movie": des séquences nunuches ralenties et l'incursion d'un pouvoir de télépathie dérisoire et pas vraiment crédible. Le film flirte d'autre part allègrement entre les genres cinématographiques ( drame, science fiction voire fantastique, romance) sans finalement se définir concrètement et s’essouffle hélas dans ses dernières minutes, comme forcé de nous livrer un happy end ultra téléphoné et dégoulinant.

Les atouts de HILN finissent cependant par supplanter ses failles et en font un long métrage
très honnête, sorte de croisement entre "Le Jardin de Ciment" de Ian McEwan ( pour l'histoire de gamins
sans repères livrés à eux-même et dénués de véritable sens moral- en bien plus édulcoré quand même-) et la Route pour la fuite désespérée dans la campagne anglaise dévastée et soudainement inquiétante. Sans
oublier cette notion d'humanité sans cesse remise en question qui est sans conteste l'un des thèmes clé
du film.