Hunger Games, c'est extraordinaire. L'épisode 3.1 nous le prouve. Et, même si l'image finale est plus ridicule qu'autre chose, cette première partie de Mockingjay met tout en place pour le final.
Peeta guérira-t-il de ses coliques néphrétiques qui le saisissent sur son lit d'hôpital : Cette critique ne le dira absolument pas.
Cet épisode, c'est celui de Katniss. Rappelons-nous : dans le premier Hunger Games, on voit les Hunger Games pendant plus de trois quarts du film. Dans le deuxième Hunger Games, on voit les Hunger Games pendant moins d'un quart du film. Soyons d'accord. Et dans le troisième Hunger Games, on voit les Hunger Games pendant… il n'y a pas de Hunger Games. Nous sommes donc d'accord. Katniss est donc seule.
Et Hunger Games, c'est extraordinaire en cela que Katniss, c'est une héroïne qui ne fout rien. Dans sa réplique la plus sincère et la plus claire, elle exprime qu'elle voulait juste sauver sa sœur et garder Peeta en vie. C'est tout. C'est une salope égoïste qui fait tout pour préserver ses intérêts personnels. Elle fait ses caprices auprès de la présidente pour qu'elle cède à ses concessions qu'elle doit écrire sur un bout de papier passé à la machine à laver parce qu'elle a une mémoire de poisson rouge. Elle refuse de coopérer et est une actrice de merde qui ne sait pas aligner trois lignes de propagande. Et elle chiale autant qu'Adèle morve dans un film que vous ne pourrez pas éviter si me lisez.
D'accord, à la limite ça arrive, il suffit de marcher dans les rues dorées du XVI° arrondissement. Mais là où c'est grave, et donc extraordinaire, c'est qu' à cause de ses caprices de star elle déclenche l'insurrection. Et l'insurrection, c'est pas la fleur au fusil et le temps des cerises. Ce sont des exécutions publiques au nom du gouvernement, un voile sur la tête et un flingue sur la tempe, mise en scène qui est extrêmement osée et n'est pas sans force au vu des menaces actuelles des groupes armés sur la terre d'Afrique. Ce sont des hôpitaux bombardés dans des champs de ruines gris, égaux à ceux de Varsosie où erre une silhouette abandonnée à la fin du Pianiste. Ce sont des lavages de cerveaux qui transforment un boulanger un peu triste en monstre capable d'étrangler d'un bond celle qu'il a aimée.
Katniss est donc une salope, ne fout rien, elle n'a même pas le mérite d'être une anti-héroïne puisqu'elle n'est même pas une héroïne.
Et pourtant, Katniss c'est Jennifer Lawrence. Suis-je objectif : cette critique ne le dira absolument pas non plus.
Mais Jennifer Lawrence a cultiver le charme naturel de Katniss depuis le début des films ; son front large, son nez droit en diagonale, ses joues charnues, ses yeux si fins et dans leur bleu son regard aiguisé. Parce que Katniss, ce n'est pas une héroïne : c'est une image.
La présidence du District 13 cherche à ne faire de Katniss qu'une image. Les propaclips sont ridicules, mais qu'ils soient un vieux montage Movie Maker sur un plateau de tournage ou un reportage direct live devant les ruines d'un hôpital et les cendres des blessés, ils accomplissent le même but aux yeux de Coin et de feu Philip Seymour Hoffman. Dans le couloir de l'hôpital, elle est incapable de soigner un seul blessé, c'est une visite d'État et une Première Dame qui va serrer la main des cancéreux en espérant que l'amour et la gentillesse et l a couverture de Paris Match vont sauver l'humanité. Rappelons à la fin la confrontation même de Katniss et de Snow : l'image de Katniss brouille le système de vidéo du Capitole et c'est l'image de Katniss qui parle à l'image de Snow. Eu les deux ennemis diamétralement opposés eux le dictateur et la résistante, eux le chasseur et l'oiseau, ils ne s'accomplissent que par écrans interposées.
C'est là que Hunger Games est éminemment cinématographique et que l'adapter a un sens autre que financier. C'est toujours bon de donner des images aux mots et d'en faire de véritables spectacles visuels, Harry Potter a bercé l'enfance de tout le monde. Mais dans Harry Potter il n'y a pas d'écrans qui viennent s'interposer entre le spectateur et les héros, il n'y a aucun intermédiaire. Alors que Hunger Games, c'est le propos. On regarde Jennifer Lawrence, une actrice, jouer Katniss en train d'être une très mauvaise actrice sur un plateau de tournage, et son image manipulée ensuite. On regarde une actrice blonde jouer un personne, avec un des meilleurs tatouages de la création, qui filme Katniss en train d'être naturelle pour donner son image au peuple et au gouvernement.
Il y a tellement d'écrans qu'il est impossible d'être atterré par le pathos, par l'incohérence, par le ridicule. Les discours et les images passent par tellement d'intermédiaire qu'on ne sait pas où regarder. Le film nous force donc à adopter la position la plus simple, celle du spectateur devant un spectacle.
Et il y a un barrage qui pète, des cadavres engloutis par des litres d'eau, des bisous, de la putain de bande originale, et des étoiles dans les yeux.
Hunger Games c'est le retour au spectacle. Au spectacle qui rappelle au spectateur qu'il l'est sans jamais lui dire avec des mot. Au spectacle qui fait s'abandonner le spectateur sans qu'il ne se pose de questions sur ce qu'il vient de voir. Au spectacle qui s'élève sur l'enjeu, beaucoup plus clair et exploré beaucoup plus en profondeur que dans les premiers opus, de la révolution, de la dictature, du peuple, et donc du public.
Pierre Corneille serait fier de Hunger Games.
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