Les hauts du Hurlevent, manière épurée
Jacques Rivette a indéniablement été marqué par « Les hauts du Hurlevent » d’Emily Brontë. Moins par le récit romanesque que par la force et la violence des rapports entre les personnages. Et c’est cela qu’il met en scène, car ici il faut parler de mise en scène plutôt que de réalisation tant la théâtralité est omniprésente. Il transpose une partie de cette histoire sur la période de l’entre deux guerres, dans le pays des Cévennes, marqué par un puritanisme forcené. Ainsi, il ajoute une dimension d’oppression aussi forte que celle voulue en son temps et dans un autre pays, par la plus sauvage des sœurs Brontë
Tout dans ce film se veut épuré et abrupt : un récit orienté volontairement sur le conflit, une photo très artificielle, des décors et des costumes spartiates. De prime abord peu accessible, Rivette semble n’avoir réalisé ce film que pour son bon plaisir et y dévoile un manque de pudeur salvateur qu’on ne lui connaissait guère dans ses œuvres précédentes. Il ne réalise pas seulement une œuvre personnelle mais nous fait part de son incroyable admiration et son assentiment pour ce chef d’œuvre de la littérature anglaise, et l’impose derechef comme la plus fidèle des adaptations.
Le résultat aurait sans doute eu moins pénétrant sans l’exceptionnelle interprétation de Lucas Belvaux. Il apporte à Roch, la même noirceur dans l’esprit de vengeance, l’impressionnante profondeur et l’attirance manifeste que l’on prête à l’Heatcliff du roman.
Un film à placer sans aucun doute dans une future collection de la Pléiade Cinématographique.