Exchange Student (le titre anglais littéral) est une curiosité étonnante du cinéma japonais des années 80, mais beaucoup moins surprenante quand on pense à d'autres films du réalisateur Nobuhiko Ôbayashi, et plus particulièrement son House totalement barré sorti 5 ans plus tôt. Le ton n'a rien à voir ici, l'excentricité est très bien contenue même si elle émerge régulièrement dans cette histoire d'échange accidentel de corps entre deux jeunes étudiants de sexes opposés. On pourrait croire qu'il s'agit d'un scénario d'anime dans le registre du gender bender, avec des productions comme le récent Your Name. de Makoto Shinka, mais le film s'en sort de manière étonnante pour aborder les thématiques de la découverte du corps, quel qu'il soit, et de l'amour adolescent.
C'est la liberté de ton générale qui lui confère sa principale singularité, en alternant entre pure bouffonnerie et crise existentielle, sans jamais (trop) tomber dans la lourdeur d'un des deux genres. L'échange des corps donne bien sûr lieu à une longue série de séquences comiques, d'une frontalité teintée de sincérité, abordant évidemment la découverte de nouveaux organes génitaux, mais aussi la découverte des codes qui semblent régir l'existence de l'autre sexe. Les deux adolescents, l'air de rien, découvrent les codes implicites imposés par la société, par les parents, par les amis : le contenu comique alimente sans cesse une sorte de récit d'apprentissage loufoque, et les deux jeunes comédiens parviennent à matérialiser à l'écran leur transformation (un peu comme John Travolta et Nicolas Cage dans Volte-Face) sans jamais tomber dans la caricature.
Les conséquences de la transformation partent du domaine du physique, avec son lot de surprises nourrissant la comédie, pour rejoindre celui du psychologique, dans un tout autre registre. Si dans un premier temps, les deux s'échangent une série de mises en garde ("ne touche pas à mon corps, ne fais pas n'importe quoi avec !", en résumé), leur relation évolue progressivement vers une sorte d'apprentissage biologique et anatomique ("dans telle situation, il va t'arriver ceci ou cela"). Tenkôsei joue beaucoup sur cette maturité grandissante, en prenant des sentiers moins attendus que celui dans lequel il s'engageait a priori. Même dans le registre de la comédie pure, il parvient à opérer un transfert intéressant, avec le passage d'une fille timide et réservée à un garçon efféminé et dénué de confiance en lui, et d'un garçon gaffeur semant la zizanie à une fille maladroite mais sûre d'elle. Quelques scènes évoquant une drôle d'homosexualité (forcément, dans ces conditions, quand une fille est attirée par une autre fille qui n'en est pas vraiment une...) jouent habilement sur l'incongruité de ces situations, sans en faire trop. Le film a ses passages attendus mais il adopte un point de vue étonnant sur la question des sexes, au début des années 80.
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