Un film qui divise, c'est toujours l'occasion pour mon entourage d'exiger que je le regarde pour trancher, car j'ai cette réputation ( sans doute pas usurpée ) : d'être tranchant.
I care a lot divise, donc, sur ce terrain particulier : c'est une fable pop et immorale, théâtre d'un affrontement jouissif entre deux stars au sommet, et d'un côté les amateurs d'un cinéma déviant et poussif saluent cette ambivalence et les performances, et de l'autre les amateurs d'un cinéma structuré et efficace regrettent que ça soit écrit au petit bonheur la chance et n'a d'ambivalent que le point de départ...
Or s'il y a un truc qui m'a immédiatement frappé dans cette supposée immoralité c'est que J Blakeson ne maitrise pas le concept. Il n'est pas immoral : il est amoral. Un film immoral décrirait les activités illicites et viles de Rosamund Pike, en prenant soin de confronter le spectateur au type de choix qu'il ferait lui-même, pour le pousser à penser la même chose. I care a lot ne sait pas faire ça... Il n'a tout simplement pas de valeur morale à décrire, ni à décrier.
Et ce que ça provoque comme sérieux problème dramaturgique, c'est que je n'ai d'empathie pour personne dans ce film. Ça n'est qu'un tournoi de bêtes féroces qui m'indiffère...
L'Acte I se charge de présenter Rosamund et sa clique comme une bande de fumiers finis qui ne méritent que de mourir d'une balle dans la nuque, et pourtant dans la deuxième heure le film se comporte comme si on était avec elle depuis le début.
Mais... Non, les gars ! Moi je n'ai pas oublié que je la déteste et que je souhaite voir sa dépouille pendouiller au bout d'une corde, bouffée par les vautours !
En gros, c'est comme si dans Die Hard, on présentait les évènements du point de vue d'Alan Rickman, et qu'ensuite, Bruce Willis jouait non pas un bon flic, mais un malfrat de la pire engeance et que ce dernier décidait de régler son compte à Alan... Moi spectateur je sais que ce sont tous des méchants et des vilains, et que je ne peux souscrire à aucune de leurs actions.
Donc je me suis fait horriblement chier à attendre un générique de fin libérateur.
Ajoutez à ça que je trouve absolument pas crédible qu'un boss de la trempe de Peter Dinklage ne s'entoure que de sbires incompétents et handicapés mentaux... et on a ce qui convient d'appeler un gros fail.
A la fin, une sorte de revirement, totalement pompé sur Carlito's Way (et mis en image n'importe comment), vient apporter une touche de "bien fait pour toi", mais c'est trop peu, trop tard, et trop mal foutu...
Donc si je suis tenu de trancher, vous l'avez compris, mon camp est celui des détracteurs du film, mais bel et bien je salue au passage les performances des actrices et acteurs qui tirent ce scénario raté vers le haut.