Pompier, bon oeil
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I origins est une science-fiction qui se veut réconciliatrice de deux concepts fondamentaux de notre existence : la science et la spiritualité. Les opposant bien souvent à tort, ce film de Mike Cahill parvient avec énormément de justesse à nous faire voyager à travers ces deux paradigmes, nous rappelant que la frontière les séparant peut-être bien mince.
Le docteur Ian Gray, personnage principal, mène une étude scientifique ayant pour objectif de découvrir l’origine de l’œil, et ainsi faire de l’évolution non plus une théorie mais un fait. En d’autres mots, le docteur Ian Gray cherche à prouver la non-existence de Dieu.
Son coup de cœur Sofi, spirituelle dans l’âme, est à l’inverse persuadée de l’existence de Dieu, posant ainsi les sentiments comme outil premier menant à la vérité. Sofi n’est autre que la personnification de la spiritualité. Tout au long du film, elle confrontera ses croyances à celles de Ian et ira même jusqu’à adopter une démarche scientifique pour l’amener à ne serait-ce que douter de son rigide schéma de pensée. Elle utilise le ver, auquel il vient de greffer un œil, pour lui expliquer que cet être, ne disposant autrefois que de deux sens, ne pouvait donc percevoir toute la lumière qui l’entourait. Le concept même de lumière lui était inimaginable avant sa mutation. Ce ver, lui dit-elle, est comparable à l’homme qui, ne disposant que de 5 sens, ne peut concevoir l’existence d’une grandeur qui le dépasse, qui est pour le moment inatteignable.
Ce passage est très intéressant et profond, car elle parvient avec brio, à légitimer l’expérience de foi en posant les hommes et femmes l’ayant vécue comme des êtres supérieurs qui auraient « mutés » pour développer un nouveau sens : un sens spirituel.
Un autre passage du film me parait primordial à souligner pour comprendre la voie qu’entreprend le réalisateur pour mettre un terme à cette vielle et fausse querelle opposant science et religion. Il s’agit de la conversation de Ian et de Pryia Verma, son contact en Inde, au sujet d’Einstein et du Dalaï Lama. Ian n’est pas religieux car il voit la religion comme des écrits statiques, ne pouvant être « challengés » et donc n’ayant pas vocation à évoluer. Au contraire, la science a pour vertu de se construire progressivement, de réfuter pour ensuite prouver, et ainsi de se rapprocher toujours plus de la vérité. Les grandes découvertes d’Einstein sur la gravitation ont succédé à celles de Newton, et sont vouées elles aussi à être dépassées.
Ce que la science veut nous dire ici, est que la religion a besoin de sortir de son cadre statique et de sa propre rigidité pour pouvoir elle aussi prétendre à atteindre la vérité. Le Dalaï Lama, comme souligné dans cette scène, l’a bien compris. Il œuvre depuis toujours pour intégrer le bouddhisme et la culture scientifique et technique occidentale. C’est donc avec beaucoup d’intelligence qu’il se dit prêt à pouvoir changer ses propres croyances spirituelles si jamais des preuves scientifiques venaient à les réfuter. Mais cette grande sagesse dont est dotée le Dalaï Lama ne semble pas encore acquise du côté de Ian. En effet, lorsque Pryia lui retourne la question, Ian ne semble lui, pas encore tout à fait prêt à pouvoir changer ses croyances scientifiques si quelque chose de spirituel venait à les contredire... Du moins pas avant sa dernière et incroyable découverte scientifique.
Le message d’I origins semble, pour ma part, clair. La spiritualité doit guider la science vers de nouveaux champs de connaissance, vers de nouvelles réalités que nous ne pouvons pas encore percevoir ni concevoir. Science et spiritualité se doivent de travailler ensemble. Le mystérieux personnage de Darryl Mackenzie, se disant travailler pour Dieu, n’en est que le message subliminal : « hope our paths will cross again », à savoir le chemin de la spiritualité et celui de la science.
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Créée
le 28 oct. 2016
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