La comédie romantique n’est vraiment pas mon domaine. Dans la mesure où je trouvais que Curtis s’en sortait bien avec Love Actually, par amour de l’Angleterre en la personne de Bill Nighy, j’ai voulu donner sa chance à cet opus.
La première surprise vient du sujet lui-même : je m’attendais à un traitement sur le modèle de Groudhog Day, à savoir les artifices d’une séduction et un récit centré sur le couple. C’est davantage l’histoire d’une famille, et c’est là que le film s’en sort le mieux. Tous les portraits fonctionnent, et l’on retrouve cette patte typiquement british, capable de vous caractériser un personnage en deux répliques, de rendre touchantes les fragilités et la spontanéité d’une tablée. La sœur, l’oncle, les parents sont instantanément familiers et rendent possible les touchantes évolutions de leurs parcours respectifs. En guise d’exemple, la scène du mariage pluvieux : sur le mode du sommaire, par touches successives, Curtis parvient à diffuser une émotion intacte et authentique.
On en vient à questionner l’intérêt du pitch, à savoir les voyages dans le temps. Outre la précarité sérieuse de la cohérence de l’ensemble (on accepte quand même un grand nombre de paradoxes insolubles, mais passons), on prend progressivement conscience de la morale à venir, assez bateau et, convenons-en, pas loin d’une publicité pour les assurances : carpe diem, les petites richesses précieuses de chaque jour, etc, etc. Cela dit, c’est moins dans son dénouement attendu que dans les instantanés que le film se déploie : le portait de l’oncle, parcellaire et touchant, et celui, surtout, du père et de son fils.
Ce jeu avec la temporalité est donc un peu plus qu’un vain artifice de scénariste : il déploie une nostalgie d’autant plus émouvante que le film s’inscrit sur un long cours cohérent et bien construit, la longueur (ici, deux heures) étant l’une des marques de fabrique de Curtis.
Pour ses comédiens, pour son regard sur les individus davantage que pour ses prétentions morales, Il était temps mérite qu’on s’y émeuve.