Il n'y aura plus de nuit par Melvin Zed

Eh bien voila un documentaire très étrange, parfois agaçant, souvent frustrant, mais restant fascinant de bout en bout. Le film repose sur une compilation d’images infrarouges prises d’hélicoptères de combat. Sur cette succession de séquences muettes, une voix off récite un commentaire laconique, écrit par la réalisatrice. Elle commente ce qu’on voit, ou évoque ce que représentent, pour elle, ces images. Elle parle d’une conversation qu’elle a eu, ou aurait eu on ne sait pas vraiment, avec un pilote français. Elle revient ainsi sur ce qu’elle a retenu de cette conversation, évoque les réactions de son interlocuteur. Plutôt qu’une explication ou un éclaircissement technique, elle rapporte plutôt les hésitations du pilote, et partage ce trouble avec le spectateur. Difficile d’avoir un avis, ou un sentiment, face à ce film. Est-ce le propos de la réalisatrice qui nous happe ainsi, ou est ce qu’on reste scotché par la fascination morbide qu’inspire ce spectacle étrange et terrifiant ? Est-ce que la réalisatrice profite du fait que l’on soit capturé par ce suspense indécent pour nous susurrer les mots de son malaise ? Ca semble être le projet du film, sa motivation. Plutôt que d’apporter des réponses techniques, politiques ou philosophiques, Eleonore Weber semble plutôt nous prendre par la main pour nous emmener contempler un gouffre terrifiant, elle partage son désarrois et nous pousse à nous interroger sur le sens de ces images affreuses, les fruits étranges d’une guerre asymétrique où des formes humaines se retrouvent brutalement ventilées, suivant le jugement péremptoire de ceux qui ont filmé, réalisé en fait, ces images… Elle nous accompagne dans la fascination qu’elles provoquent et nous pousse subtilement à nous interroger sur leur sens. Je suis sorti de tout ça vraiment troublé, englué dans une angoisse cotonneuse. Je ne sais pas trop quoi penser du film, mais j’ai vraiment aimé l’expérience, et les questions qui en découlèrent, un état qui s’est prolongé bien après la fin du documentaire…