ILLEGITIME (15,6) (Adrian Sitaru, ROU, 2016, 89min)
Ce drame familial puissant raconte les conséquences sur quatre frères et sœurs qui découvrent lors d’un repas de famille houleux la véracité d’un lourd secret du passé de leur père. Adrian Sitaru de manière théâtrale ausculte les générations de la Romanie moderne en déterrant les fantômes de Ceausescu et contribue à mettre en avant la Nouvelle Vague de cinéastes roumains. Sa mise en scène caméra à l’épaule pour mieux traduire tous les déséquilibres familiaux, illustrée par des gros plans, nous plonge au cœur des tourments, interpelle notre propre morale et dissèque l’âme humaine avec un discernement remarquable. Une mise en place un peu théâtrale (que l’on retrouvera dans le Xavier Dolan «Juste la fin du monde») où l’improvisation a une grande place, un aspect formel quasi documentaire donne parfois des aspects un peu trop académiques au projet mais parfaitement maîtrisé. Néanmoins la force du scénario, l’acuité des thèmes abordés (avortement, inceste, amour familial…) et la manière de les disséquer aussi intelligemment, cette tragédie antique à tout pour inscrire dans nos mémoires certains passages d’une pertinence linguistique admirable. Et nous nous souviendrons de ce premier plan qui invite la « Sonate au clair de lune » de Beethoven a accompagné de sa mélancolie les héros que l’on découvre les premiers liens au sein de la voiture du patriarche (joué par l’excellent Adrien Titieni «Baccalauréat»). Un long-métrage influencé par le cultissime "Festen" (1998) de Thomas Vinterberg et le poignant "4 mois, 3 semaines, 2 jours" (Palme d’or 2007) de Christian Mungiu Venez partagez ce repas consistant et vous faire votre propre avis «Légitime» ou «Illégitime». Dérangeant, prenant, malin et bouleversant.