"L'homme est un loup pour l'homme."
"Ils", qu'est ce que c'est, sinon une charmante illustration de cette citation de Hobbes ? Ce film est une partie de chasse. C'est l'histoire d'un couple qui décide d'emménager dans une baraque immense (et effrayante), dans la forêt, en Roumanie. Les pays de l'Est se traînent une sale réputation, dans les films d'épouvante ou de torture porn (voir "Train", "I Spit On Your Grave II"). C'est par là-bas qu'y'a des chauves qui tuent des gens en riant très fort, enfin, selon un imaginaire propre aux films d'horreur.
Bref.
Dans cette maison va se jouer un huis-clos particulièrement sordide et étouffant. Une bande de jeunes (jouez donc à deviner l'âge et faites la même grimace que moi au moment, juste avant le générique, où ils disent "ceci est une histoire vraie, bla bla bla") va victimiser un couple, entre la fin des cours et le premier bus. Le temps d'une nuit, quoi. La nuit, tout change, n'est ce pas ? Les repères s'effacent, notre acuité visuelle devient profondément merdique, et y'a la fatigue, et y'a la peur, parce que c'est dans le noir et dans l'ombre que se cache tout ce qui effraie.
Bon, y'a des trucs intéressants, dans ce film. Le côté huis-clos, très réussi, d'abord. La maison, je le répète, est immense, ce qui lui offre une capacité de résonance effroyable. Et puis elle est vieille, alors elle craque. Et puis c'est en Roumanie, terre étrangère et lointaine, ce qui n'a rien de rassurant. Le couple y est depuis trois mois, la barrière de la langue est encore bien là, ce qui confère au monde qui les entoure un aspect très peu rassurant. Et même la forêt, tous ces arbres à perte de vue, et je ne vous parle pas de la partie de cache-cache sous terre ... Mh, oui, le huis-clos est maîtrisé. Ah, ça, c'est bon, parce que ça entraîne le spectateur, ça l'étouffe. Voilà le deuxième point fort de ce film : la capacité à tenir le spectateur en haleine. "Ils" ne dure pas longtemps, ce qui ne nous laisse pas le temps de nous lasser. On est emportés, tout le temps, coûte que coûte. Et, dernier très bon point, "Ils" ne jouent pas (ou alors très peu) la carte du "Je vais te faire sursauter toutes les six secondes" propre aux mauvais films d'horreur, qui justifient ce titre parce qu'ils font du mal à nos nerfs et à notre palpitant en faisant surgir tout et n'importe quoi rien que pour nous faire frôler la crise cardiaque. Non, ce film, c'est plus une ambiance qui se referme petit à petit, des murs qui se resserrent. "Ils" est oppressant. C'est une main qui se referme autour d'un cou, une lame qui s'enfonce petit à petit dans la peau.
Le pire étant qu'on ne voit (presque) rien, et qu'on imagine tout.
Et la fin, c'est le coup fatal. Ah putain. Ah oui.
Bon, je ne me risquerais pas à le comparer à "Funny Games", "La dernière maison sur la gauche" ou autre film où une famille se fait attaquer au sein même de sa maison. Ce serait une erreur, et ça ne servirait à rien. Voyez-le comme un film qui fait ... peur, oui, de façon brutale et subtile à la fois. Petit à petit, on réalise que notre cœur bat plus vite, que notre respiration devient de plus en plus bruyante, que l'obscurité est de moins en moins rassurante et qu'on ose à peine bouger.
Si vous voulez vous faire une petite frayeur et inscrire dans votre crâne des images auxquelles vous repenserez, seul, dans votre grande maison, regardez-le donc.