Images se classe assez naturellement dans la partie portée sur l'étrange de la filmographie de Robert Altman, aux côtés de Brewster McCLoud et surtout Trois Femmes qui sortira 5 ans plus tard et dont il semble être le brouillon (entendu au sens non-péjoratif du terme). En prenant pour cadre de la majeure partie du film un petit coin de campagne irlandaise (magnifié par le savoir-faire de Vilmos Zsigmond), une maison au bord d'un lac, cascades et falaises, verdure et pâturage, cette dimension bucolique pénètre peu à peu des sphères plus psychologiques pour décrire la crise vécue par Cathryn, sous les traits de Susannah York.
Beaucoup plus direct dans son introduction que celle de Trois Femmes, n'hésitant pas à dépeindre de manière explicite à l'écran les troubles de la protagoniste, Images s'intéresse de la même façon au portrait d'une femme tourmentée. Beaucoup plus violent, aussi, car même s'ils ont lieu dans l'univers de l'hallucination, les meurtres et les agressions sexuelles sont légion et explicites dans son référentiel. Petit à petit, on pénètre la psyché de Cathryn et sa perception du monde remplie de visions effrayantes. Des images terrifiantes, donc, avec des anciens amants morts qui refont surface, mais aussi des sons, tout aussi anxiogènes, et des musiques angoissantes (collaboration entre John Williams et Stomu Yamashta). Le dérèglement de sa perception est glaçant, dans ce qu'il impose de normalité face à des situations profondément anormales (ou jugées comme telles, parfois : au final, il y avait bien une petite fille dans la cage d'escalier, par exemple, et il ne s'agissait pas d'une hallucination) : se prétendre sain d'esprit en pleine connaissance de sa folie est une expérience éprouvante. Seule la fin du film, un peu facile, semble légèrement bâclée.
Parti pris étonnant, Altman ne s'embarrasse d'aucune ambiguïté sur l'état de santé de la protagoniste : il est uniquement question d'illustrer un malaise, sans vraiment laisser de place à la suggestion — en exagérant un peu. Il y a une forme de banalisation de l'hallucination, qui aurait sans doute pu apparaître de manière plus puissante et déroutante dans un cadre plus mystérieux et implicite, mais qui n'en reste pas moins extrêmement dérangeante dans l'observation presque clinique d'une perturbation. Altman se focalise presque uniquement sur des détails, à l'image des deux personnages féminins en miroir, Cathryn, interprétée par Susannah York, et la jeune Susannah, interprétée par Cathryn Harrison. La relation duale entre les deux est autant soulignée par le jeu avec leurs prénoms (entre actrices et personnages) que par la mise en scène, à travers de nombreux plans superposant leurs visages à l'aide d'un reflet sur une vitre. Libre à nous d'interpréter cela, par exemple en suivant la piste psychologique d'un refus du passage du statut de femme à celui de mère.
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