Sur un pied de Stahl
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C'est forcément un peu gênant de regarder aujourd'hui un film produit en pleine régulation du code Hays, abordant une thématique courageuse à l'époque (les problématiques liées à la couleur de peau d'une femme noire dans les années 1930), essayant de faire tout ce qu'il peut semble-t-il dans le cadre un peu étriqué imposé par Hollywood à l'époque. C'est l'un des premiers films étasuniens à aborder aussi directement les problèmes rencontrés par une femme noire, avec une considération notable et avec un poids émotionnel qui n'est pas minoré par rapport aux soucis de son amie blanche, mais bon, un siècle d'évolutions sociales rend tout de même le visionnage piquant à de nombreux moments.
Pour le résumer un peu crûment, on peut dire que Claudette Colbert se cache derrière une gentillesse sans aucun doute sincère pour mieux exploiter son amie noire (Louise Beavers), que ce soit à la maison au travers d'un travail très mal rémunéré ou en affaires en volant son savoir-faire pour le porter à l'industrialisation et lui retourner seulement 20% des bénéfices — tout en faisant passer ce geste pour une magnanimité infinie. On comprend bien qu'à l'époque, il aurait été presque normal de ne rien lui verser du tout en retour, mais quand même, c'est une marque de progressisme bien timide vue d'aujourd'hui. Sans rentrer dans les détails, il y a également une condescendance assez franche qui irrigue tout le film au travers des relations entre le personnage noir et les autres, cette dernière étant prête à subir à peu près tous les sacrifices pour son entourage. On ne se défait pas instantanément des clichés et des réflexes de son époque, certes. En tous cas, selon cette perspective, le parallèle établi entre les deux femmes et les soucis avec leurs filles respectives me paraît grandement déséquilibré.
Si on met de côté le fait que la femme noire est un personnage un peu benêt et incapable d'agir seule pour son propre intérêt et tous ces aspects paternalistes mêlés dans la joie et la bonne humeur à la beauté du capitalisme et de la libre-entreprise, il reste quand même quelques éléments intéressants. La crise de la fille noire qui ne s'assume pas en tant que tel (elle est très claire de peau) offre pas mal de pistes de réflexion sur le sujet. Le ressort dramatique du côté de la romance de Colbert est plutôt bien négocié également, avec une tension qui naît de la potentielle relation que son amant aurait avec sa propre fille. Mais bon, la structure chancelle quand même.
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Créée
le 3 févr. 2023
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