Un documentaire de 3 heures 10 sur un quartier de NYC, moi qui voyage assez peu et qui fantasme beaucoup sur les USA (me disant encore parfois que j'y finirais bien mes jours), je m'enchantais de voir ça. Hé bien, j'ai été déçu. J'ai même trouvé ça assez lugubre.
Filmé par Wiseman, on a l'impression qu'il n'y a quasiment que des transsexuels dans ce quartier. Ou des latinos cathos et demeurés. Ou des bouddhistes encore plus demeurés. Ou des vieilles et des vieux pauvres ou handicapés. On entend des femmes vieillissantes dire que tous les acteurs d'Hollywood ou quasiment sont homosexuels (Tyrone Power en tête). On nous montre longuement des musulmans égorger des animaux dans des conditions révoltantes. On suit pendant 10 longues minutes le destin horrifique de poules, coqs et canards qu'ils égorgent en chantonnant, avant de les faire saigner dans des machines de mort, les déplumer, évider, laver, balancer avec une totale indifférence au suivant de la chaîne de transformation (de l'animal vivant à la viande découpée et sous cellophane). On ne coupe ni au "classique" (car déjà montré cent fois dans d'autres circonstances) défilé de la Gay Pride, à laquelle participait, lors du tournage de ce documentaire, le maire de NYC en personne, ni au rappel de tout ce que le peuple juif a subi d'atroce durant la 2ème guerre mondiale (camps de concentration, plusieurs millions de morts, ...).
Bref, on a droit à une longue litanie d'horreurs diverses (qui, ensemble, présentent une vision extrêmement critique de la capitale américaine, via un de ses quartiers les plus populaires, ainsi que de la "société de consommation" dont elle est la triste et parfois affreuse illustration). J'en cite encore une qui me revient à l'esprit : jeune transsexuel tué d'un coup de poing devant un commissariat de police par un mec (se baladant avec ses potes) qui avait d'abord flashé sur lui, le prenant pour une jeune femme.
Pour finir, on nous inflige un interminable discours dénonçant les vastes opérations immobilières qui menacent de vider ou d'expulser du quartier les habitants de longue date mais sans moyens financiers et de détruire les vieilles "bicoques" qu'ils habitent ou dans lesquelles ils font du commerce à petite échelle, pour les remplacer par de luxueux buildings pour grands groupes industriels ou particuliers pleins de thunes, buildings qui vont défigurer le Jackson Heights dans lequel il a fait si bon (?) vivre jusqu'à présent.
Ma façon de résumer le documentaire de Frederick Wiseman risque de déplaire, car j'ai lu sur lui beaucoup de critiques élogieuses. Mais je suis sorti déprimé de la salle de cinéma. Cela ne m'a pas du tout donné envie d'aller habiter dans le Queens (dont Jackson Heights est un des quartiers), même si les loyers des apparts y sont beaucoup plus abordables qu'à Manhattan ou Brooklyn.
J'ai mis "6" pour la somme de travail que ce long (ô combien) métrage représente et parce qu'il vaut quand même un peu plus que la moyenne, même si la vision de Wiseman semble assez biaisée. Etant totalement responsable de son film (production, réalisation, montage visuel et sonore), l'image qu'il donne à voir de Jackson Heights et, en dézoomant, de New York et de l'Amérique d'aujourd'hui est, je le crains, très subjective. Un autre réalisateur aurait sûrement sorti, sur le même quartier de New York, un documentaire bien différent.