Je viens de revisionner le film de Wong Kar-Wai In the Mood for Love et je l'ai davantage apprécié cette fois-ci, si bien que je pense le revoir une nouvelle fois si l'occasion se présente.
Ce qu'il y a de plus réussi dans le film, c'est ce thème musical de Shigeru Umebayashi, sublime de mélancolie et parfaitement inoubliable. Par contre, j'avoue ne pas avoir été immédiatement en empathie avec la ville de Hong-Kong, en tout cas avec les quartiers montrés, que j'ai trouvés trop "asiatiques" (exigus, cabossés, tortueux, oppressants) pour moi qui suis ultra-européen et aie très peu voyagé hors de l'hexagone. Pareil pour les deux personnages principaux du film. Ils ne m'ont pas été non plus immédiatement sympathiques, je ne les ai pas trouvés particulièrement séduisants, et leur apparence soignée (et même, pour elle, apprêtée), alors qu'ils vivent dans un environnement étriqué et presque pauvre, m'a déconcerté. Mais bientôt, au fil des minutes, mes réticences premières se sont évanouies et je suis bien entré dans le film, avec sa succession de scènes courtes, cadrées de près, montées cut et très méticuleusement, ces scènes souvent silencieuses, ces champs et contre-champs rapides qui captent les expressions de visage révélatrices des pensées intimes de la personne filmée en plan rapprochée. J'ai été alors, presque malgré moi, captivé par cette valse-hésitation, par cet amour que l'une et l'autre éprouvent manifestement et qu'ils n'osent pas (pas suffisamment) exprimer, par cette chance d'amour qui se présente avec insistance et qu'ils n'osent pas franchement saisir, même quand ils sont coincés pendant des heures (toute une nuit ?) dans une chambre (un peu façon Rohmer et Ma nuit chez Maud), en tête-à-tête. Oui, j'ai été touché par la mélancolie de cet amour ressenti mais non traduit en actes, ces doigts qui n'arrivent pas à se nouer, ces corps sans doute pleins de désir mais qui ne s'enlacent pas, ces appels téléphoniques qui n'aboutissent pas, ces voyages qui éloignent, ces visites ratées, ce temps qui passe et passe encore et qui fait peu à peu de l'amour un souvenir atrocement mélancolique et douloureux, et puis : poussiéreux.
J'ai quand même pensé que chez Su Li-zhen (que joue Maggie Cheung), et comme le dit mon titre, le respect de soi est, sans doute, plus fort que l'amour éprouvé pour Mr. Chow (Tony Leung), d'où ce ratage amoureux, cette progressive résignation des deux partenaires potentiels.
Mais cet enfant que l'on entrevoit au côté de l'héroïne vers la toute fin du film, il est de qui ? De son mari revenu du Japon ? Ou... d'une fugitive étreinte avec Mr. Chow ? Wong Kar-Wai nous laisse dans l'expectative.
Allez, on se réécoute le thème musical principal du film, il dit tout, beaucoup mieux que moi, de cet amour douloureusement différé et si peu vécu (sans doute par excès de respect, de soi ou de la personne aimée) : https://www.youtube.com/watch?v=39Qdzx_Ge-g