Je n'ai jamais vraiment compris la relative disgrâce qui pèse sur cet épisode des aventures d'Indiana Jones. Les fans semblent souvent le considérer comme un épisode à part, mal équilibré, à la fois trop "grand-guignolesque" et trop sombre. Je vous le dis tout de go: j'aime le changement. Confronter systématiquement Indy à des Nazis ou à de vilains communistes, ça me gonfle. Je ne vois pas pourquoi le respect des sacro-saintes ficelles scénaristiques imposées par le premier épisode devraient perdurer à tout jamais. Dans les autres opus, la relique au centre de toutes les attentions n'est guère plus qu'un MacGuffin qui justifie qu'un type se trimballe autour du monde en fouettant des soldats systématiquement passionnés par des pouvoirs occultes censés les faire régner sur le monde... Sinon, une bonne tactique militaire, ça peut aider aussi, hein ? Attention, je trouve que cette recette fonctionne très bien pour l'épisode 1 et 3, mais il faut aussi pouvoir innover et, surtout, surprendre. Le Temple Maudit y est parvenu, en ce qui me concerne.
Tout d'un coup, j'étais plongé dans une histoire intemporelle. La jungle, la secte démoniaque teintée d'Hindouisme, la drogue qui rend esclave, la promesse des ténèbres... La relique et les méchants qui veulent gouverner le monde étaient là, eux aussi mais, cette fois, comme des éléments presque secondaires. J'ai retrouvé toute l'audace et l'émerveillement des meilleurs récits fantasy d'Howard (l'auteur de Conan) et autres Wagner. Une histoire aussi simple qu'un bon vieux pulp mais totalement décomplexée, immersive, purement jouissive. Chaque aspect y est poussé à l'excès, exagéré, mais jamais ridicule comme peut l'être le Crâne de Cristal. La première partie est ouvertement une comédie avec une Indiana-girl et un mioche chinois qui peuvent paraitre très gonflants à priori mais qui finissent curieusement par se fondre dans l'histoire comme des morceaux de sucre dans un café bien noir. Car, au moment où l'on se dit que l'on se trouve devant une espèce de potacherie très éloignée du premier opus, le film fait un virage à 180° et nous sert des scènes bizarrement glauques sans pour autant jamais tomber dans l'horreur. Quelle oeuvre oserait un tel revirement, aujourd'hui ?
Le Temple Maudit déstabilise la première fois qu'on le regarde. Voir Indy rendu impuissant, en proie à de noirs cauchemars qui ne sont que suggérés pour, enfin, frapper le gosse qui s'est attaché à ses pas a quelque chose de troublant qui me plait: j'aime les héros qui en chient. Surtout que le film propose un deuxième revirement lors du final: la renaissance du héros, plus classe et fou que jamais, chemise déchirée et sourire cassé au bord des lèvres, prêt à défier la mort avec l'assurance des seuls demi-dieux mythologiques.